Trois mois de shuddhikaran (purification) pour les parents, des rapports intimes fixés en fonction de l’alignement des planètes, une abstinence totale après la conception du bébé et un régime alimentaire spécifique. Voilà ce que recommande Arogya Bharati, une organisation de santé proche des nationalistes hindous du RSS (Rashtriya Swayamsevak) aux femmes désireuses de donner naissance à un uttam santati, un “enfant sur mesure”.

   D’après ses responsables, cet ambitieux programme aurait été lancé dans l’État du Gujarat il y a plus de dix ans et aurait été étendu à l’ensemble du pays en 2015. Le projet compte aujourd’hui dix annexes dans le Gujarat et le Madhya Pradesh, et devrait bientôt ouvrir d’autres antennes dans l’Uttar Pradesh et le Bengale-Occidental. “Notre premier objectif est de construire une samarth Barath (une Inde forte) grâce aux enfants sur mesure. Nous voulons des milliers de bébés d’ici 2020”, explique le Dr Karishma Mohandas Narwani, qui chapeaute le programme.

   L’inspiration viendrait d’Allemagne, un pays qui, selon les responsables du projet, s’est réinventé à travers ses enfants grâce à des pratiques ayurvédiques [pratiques médicales traditionnelles en Inde] mises en place durant les deux décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale.

   “Même avec des parents qui ont un faible QI et n’ont pas fait beaucoup d’études, un enfant peut se révéler tout à fait brillant. Si l’on suit les bonnes pratiques, les enfants de parents à la peau foncée peuvent avoir le teint plus pâle que leurs parents et être plus grands”, affirme le Dr Hitesh Jani, responsable national d’Arogya Bharati.(...)

   (...) À en croire Jani, ancien volontaire au RSS et responsable du service de panchakarma de l’Université d’ayurveda du Gujarat à Jamnagar, ces méthodes de conception de l’enfant sont déjà mentionnées dans les traités hindous. Le programme aurait déjà permis la naissance de 450 “bébés sur mesure” et a pour objectif d’ouvrir un centre dans chaque État d’ici à 2020.

   D’après Narwani, Arogya Bharati a déjà organisé plusieurs séminaires et ateliers à Delhi, Bombay et d’autres villes comme Udupi (Karnataka), Kasaragod (Kerala) et Visakhapatnam et Vijayawada (Andra Pradesh). D’autres rendez-vous étaient prévus à Calcutta le week-end suivant, puis à Rohtak et à Gurgaon (Haryana). “Nous n’intervenons pas sur le processus naturel”, précise Nirwana, ces principes sont simplement guidés par l’ayurveda.

   “L’ayurveda détient les clés de l’apparence physique et des qualités mentales du bébé. Le QI se développe au cours du sixième mois de grossesse. Si la mère suit un régime spécifique, mange, écoute et lit ce qu’il faut, l’enfant aura le QI désiré. C’est ainsi qu’on obtient des bébés sur mesure”, conclut-elle. Cette procédure empêcherait également la transmission de gènes défectueux à l’enfant. (...)

   (...) Le projet aurait été lancé à l’initiative d’un maître à penser du RSS, qui aurait reçu un conseil il y a près de quarante ans en Allemagne, explique Ashok Kumar Varshney, militant du RSS depuis plus de trente ans et secrétaire national d’Arogya Bharati. “Quelqu’un lui a parlé d’une femme appelée la ‘Mère de l’Allemagne’. Quand il l’a rencontrée et interrogée sur sa résurrection, elle lui aurait répondu : ‘Tu viens d’Inde et tu ne connais pas Abhimanyu (le fils d’Arjuna dans le poème épique du Mahabharata) ?’ Elle lui aurait expliqué que l’Allemagne avait pu renaître grâce au Garbh Sanskar [forme d’éducation du fœtus pendant la grossesse] et que c’était la raison pour laquelle le pays était si puissant aujourd’hui”, raconte Varshney.

   Dans le Mahabharata, il est dit qu’Abhimanyu a appris l’art de briser le chakravyuh (le piège circulaire) alors qu’il était encore dans le ventre de sa mère et que son père expliquait à voix haute la façon de quelle façon procéder.Les textes anciens prescrivent les périodes spécifiques pour avoir des relations sexuelles. Les médecins disent aux couples quel moment est le plus propice pour concevoir en fonction de leur horoscope ou de la position des planètes… Une fois que l’embryon apparaît, les parents ne doivent plus être intimes. Ce serait suicidaire pour la mère et l’enfant, affirme Varshney. (...)

   (...) Narwani et Jani possèdent un diplôme universitaire en médecine ayurvédique et Varshney a obtenu son doctorat en biochimie à l’université d’Allahabad en 1986. Le programme comporte deux volets, explique Jani : avant et après la naissance. “La première partie est consacrée au nadi shiddhi (la purification des canaux d’énergie) et au deh shuddhi (la purification du corps) pendant quatre-vingt-dix jours. Pendant cette période, nous purifions le sperme de l’homme et l’ovule de la femme de manière à ce qu’ils ne soient pas porteurs de gènes défectueux”, explique-t-il.

   Puis, durant la grossesse, c’est le régime alimentaire de la mère qui devient une priorité.Il faut du calcium au troisième mois, quand les os se développent, donc du lait et des produits laitiers. Quand le cerveau se développe, pendant le cinquième mois, il faut du ghee [beurre indien]. Quand les yeux se forment, aux sixième et septième mois, il lui faut de la vitamine A”, assure Varshney.

   Mais ce n’est pas tout. “La mère peut contribuer au développement mental de l’enfant en chantant des shlokas et des mantras. Si elle suit ces principes, elle enfantera sans douleur et l’enfant pourra peser jusqu’à 300 grammes de plus.