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       Je sais, je n'aurais pas dû. Se laisser à une telle facilité, jouer les Croquignols du langage, ça ne le fait plus. Libé et les journaleux de France et de Navarre s'y sont tous collés. C'est d'ailleurs, certainement, un des exercices les plus courus, que celui de jouer avec le langage. De voir derrière les mots employés, surtout quand il y a une mistake, un secret enfoui. Freud a d'ailleurs été le premier à l'avoir étudié. Lucien Degoy, réalisant un article à propos de "Le mot d’esprit, l’humour, la mort et Freud" de Sarah Kofma, écrit ce qui suit, le 25 janvier 1994: 

      " Freud s’intéresse prioritairement au mot d’esprit. Il montre que dans ce processus le langage est une manière indirecte, détournée de satisfaire des pulsions sexuelles ou des pulsions agressives qui ne peuvent se satisfaire comme telles dans la société en raison des interdits qu’elle véhicule.


       Par exemple ? Cette vieille histoire juive du personnage du pauvre, le « Schronner », qui va quémander de l’argent au banquier riche Rothschild. Le banquier lui en donne et découvre le pauvre, quelque moment après, dans un grand restaurant en train de manger un bon plat de saumon mayonnaise. « Comment oses-tu pleurer misère sur ta femme et tes enfants et te montrer ici », s’indigne-t-il. Et l’autre de répliquer : « Quand je n’ai pas d’argent je ne peux pas manger du saumon, et quand j’en ai, je ne le pourrais pas non plus ? Alors quand puis-je manger du saumon ? »

       La réponse est logique, mais en même temps elle cloche : elle rompt avec la logique ordinaire de la société qui voudrait que le pauvre ne vienne pas dans un restaurant chic. Ce qui fait rire c’est qu’à l’occasion de ce jeu de mot affleure une logique inconsciente qui nous fait plaisir : le pauvre prend en quelque sorte sa revanche sur les interdits en affirmant la satisfaction de sa pulsion (ici l’envie de manger un bon repas). Il obéit à ce que Freud appelle le principe de plaisir par opposition au principe de réalité (la société). Seulement tout cela ne se dit pas directement : il faut le détour par le mot d’esprit pour engendrer le plaisir et le rire."

       
       Suis-je sûr que le jeu de mot de mon titre fonctionne de cette façon? "Illusoire" aurait été plus fin, bien que moins bien compris. Peut-être. Mais le pluriel aurait été oublié. 
       
       Cependant, par son sens même "qui fait illusion, trompeur" avec ses synonymes " apparent, chimérique, faux, fictif, idéal, imaginaire, imaginé, inexistant, inventé, irréalisable, irréel, spécieux, superficiel", l'adjectif se suffit à lui-même. Mais il est moins poseur. Et donc moins visible. Finalement, parfois, un dessin - simple et bien exécuté - vaut mieux qu'un long et prétentieux discours!

    Benoît Barvin.


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