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    Pensées pour nous-mêmes:

    (A TRAVERS LES VOLETS FERMÉS
    VOIS-TU TOUJOURS LA LUMIÈRE?)

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    "Hum... Quelle intrigante odeur...
    - J'ai cueilli ces fleurs sur la tombe de votre
    mari que vous m'aviez chargé de supprimer"


    Elizabeth Barrett Browning (1909), Albert Chevallier Tayler

    commons.wikimedia.org

    °°°



    Inventer une langue, c'est facile
    (et ça peut rapporter gros) !

    SERENA DANNA

       (...) [Article initialement publié le 8 février 2012] "Personne ne me croit quand je dis que mon gros livre est une tentative pour créer un monde dans lequel une forme de langage conforme à mon esthétique personnelle peut sembler réelle. Pourtant, c'est la vérité". Cette déclaration d'amour linguistique est signée de l'écrivain britannique J.R.R. Tolkien qui a enthousiasmé des générations entières avec ses idiomes fantastiques, créés spécialement pour les personnages de ses histoires. 

       L'auteur du Seigneur des anneaux est le symbole d'une approche artistico-littéraire de la création linguistique. Une approche qui, du fameux baragouinage du diable dans la Divine comédie de Dante à la "novlangue" de George Orwell dans 1984, englobe le "‘vonlenska" du nom de la langue inventée par le chanteur du groupe islandais Sigur Ros et l'"europanto" [parodie de l'espéranto] de l'écrivain et traducteur italien Diego Marani.

       Maintenant que les "conlangers", comme on appelle les inventeurs de langues artificielles, sont devenus des professionnels surpayés par les majors d'Hollywood, on sourit en pensant aux étapes franchies par cette étrange passion des érudits et des idéalistes, devenue un métier à l'époque du fantastique et de la science-fiction version 2.0. Qui sait ce qu'aurait pensé Ludwik Lejzer Zamenhof - le créateur polonais de l'espéranto qui a consacré une bonne partie de sa vie à rêver d'une langue commune à tous les peuples du monde - du professeur Paul Frommer, grassement payé par le réalisateur James Cameron pour plancher sur le "na'vi", la langue fictive parlée par les indigènes dans son film Avatar. 

       Ou bien la féministe Suzette Haden Elgin (une des premières blogueuses de l'Histoire) qui s'est battue pour que son "laadan" devienne la langue des femmes, de la très moderne "Language Creation Society" qui propose ses services d'invention de langues aux entreprises. Notez que l'un des fondateurs de la "Language Creation Society" n'est autre que David Peterson, le "pape" du "dothraki", le dialecte utilisé dans la célèbre saga de science fiction Le Trône de fer [saga de plusieurs volumes vendue à plus de 7 millions d'exemplaire, récemment adapté en série télévisée].

       "Aucune des centaines de langues créées pour des ‘raisons sociales', assure Arika Okrent, auteur de In the Land of Invented Languages [Au pays des langues inventées] dans un article du New York Times, n'a été aussi populaire que celles inventées par le cinéma, la télévision et la littérature. Des années durant, on était en quête de la langue parfaite mais le défi n'a jamais rencontré beaucoup de succès. Il a fallu pour cela attendre l'ère du divertissement". (...)

       (...) La Recherche de la langue parfaite dans la culture européenne d'Umberto Eco avait besoin du cinéma et d'Internet pour trouver un public. Certes, les mordus objecteront que le triomphe des "conlangers" est un phénomène déclenché par la saga de Star Trek, lorsque le linguiste Marc Okrand inventa la langue "klingon" pour le compte de Paramount Pictures. Pourtant, malgré les innombrables fans, la version klingon du Monopoly et la naissance d'un Institut de la langue klingon, le dialecte ne s'est pas popularisé. 

       Il n'est parlé que par vingt personnes (parmi lesquelles ne figure même pas Okrand). Au fond, le problème du linguiste américain ressemble à celui du futuriste russe Krucenych, auteur de la poésie "dyr bul scil ubescur skum vy so burlèz" (qui ne veut rien dire) : une grande difficulté sonore et linguistique qui contrarie l'apprentissage et le partage.

       Les nouvelles langues créées par les géants du fantastique et de la science-fiction ont une grammaire et une diversité lexicale (le dothraki compte 10000 mots) qui ne les rendent pas différentes de l'italien ou du japonais. Arika Okrent explique ainsi qu'"un vocabulaire riche est plus difficile à apprendre mais exige moins d'efforts pour la construction du sens." "Au contraire, poursuit-elle, un lexique pauvre a besoin de l'aide du contexte et des conventions sociales pour se répandre".

       Les chances de survie d'une langue fabriquée dépendent de la diffusion que celle-ci trouvera au sein d'un groupe de personnes. "Si l'espéranto n'a pas disparu, souligne Arika Okrent, c'est parce qu'il ne cesse de s'affranchir des intentions et des strictes règles de son créateur". Pour la spécialiste, l'étude d'une langue, même naturelle, relève plus d'une décision affective que d'une motivation d'ordre pratique. La volonté d'appartenir à un groupe entre en jeu. (...) 

       C'est pourquoi Internet, avec ses communautés numériques d'un côté et les possibilités de jouer avec la langue de l'autre, représente la plateforme de lancement idéale pour les "conlangers". C'est un étudiant de 23 ans de l'université de la Sarre, en Allemagne, qui gère actuellement le site dothraki.com, sur lequel on peut trouver un dictionnaire anglais-dothraki et une grammaire. Pour apprendre la langue de la planète Pandora, les réseaux sociaux (notamment le compte twitter @learnna'viainsi que des milliers de groupes sur Facebook) constituent désormais les outils les plus utiles et les plus accessibles.

       Bien que les spécialistes se lamentent encore sur la fermeture de langmaker.com, le site qui cataloguait les langues inventées dans le monde (environ 2 000 jusqu'en 2007), passer des tristes forums des années 1990 aux réunions des pratiquants de la langue na'vi dans le comté de Sonoma, en Californie, transmises via Twitter, est une belle conquête pour la "démocratie linguistique" dont rêvait Zamenhof.

       Il y a quelques années encore, l'unique moyen de devenir "conlanger" était de consulter le Language Construction Kit [kit de construction de langue] de Mark Rosenfelder (l'auteur du "verdurian" qui compte de nombreux adeptes) sur le site zompist.com. Aujourd'hui, il suffit de taper le terme "langmaker" sur Google ou sur Bing pour trouver des centaines de manuels très simples d'emploi.

       Peterson et Frommer imaginent un avenir dans lequel les universités enseigneront le dothraki comme aujourd'hui le swahili et l'arabe, dans lequel les langues fabriquées auront finalement des pratiquants "de langue maternelle". Un privilège qui n'est réservé à l'heure actuelle qu'aux enfants de quelques couples d'"espérantistes". "Lorsque, par la suite, ils se rendent compte que les parents parlent aussi une autre langue, un autre idiome utilisé par leur communauté de référence, ils s'empressent d'abandonner l'esperanto", estime Arika Okrent. Rêveurs ou visionnaires, les "conlangers" sont les derniers témoins des merveilles du langage. 


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    "Mais je suis fatiguée, mon chéri...
    - Tu n'y penses pas! Et comment tu vas
    me payer mon T-shirt de marque si
    tu ne travailles pas dans la rue,
    comme tous les soirs, hein?"



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    Luc Desle

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (PRENDS LE TEMPS
    D'AIMER LE TEMPS)

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    LONG RÉCIT AU LONG COURS (1/6)
    pcc Benoît Barvin et Blanche Baptiste

       Dans ses carnets secrets, Soeur Camille de l'Incarnation évoque le pouvoir d'Angélus, son petit frère, pouvoir qui lui vaudra, hélas, le mépris puis la haine de ses congénères...

    ANGÉLUS 
    ou 
    LES SECRETS DE L’IMPALPABLE 


    Delacroix

    CHAPITRE 2 

       Le départ de ma soeur au Carmel avait été une grande déchirure que j’avais comblée en m’isolant dans un monde peuplé de délices, de rêveries et de découvertes. 

       Bien que le curé se soit méfié de moi, (il lui arrivait souvent de se signer lorsqu’il me voyait), j’avais voulu aider au service de la messe et j’y avais mis tant d’onctuosité qu’on finit par m’accepter et que je fis bientôt partie du décor. Cela ne plaisait évidemment pas aux femmes du bourg qui voyaient en moi, onzième enfant et surtout septième garçon de la fratrie, un avatar du Diable. Elles pensaient d’ailleurs que j’avais été cause de la mort de ma mère. Mais elles taisaient leur fiel, se contentant, à mon égard, d’un mutisme méprisant que j’avais fini, en regard, par ne plus remarquer. 

       Je servais donc la messe tous les dimanches, non pas par un quelconque sentiment religieux mais plutôt pour avoir accès à un monde de douceur et de raffinement où, pendant quelques heures, j’avais le droit de revêtir des vêtements immaculés, pleins de senteurs de myrrhe et d’encens. Là, j’étais dans mon élément. Je pouvais parfaire mon ressenti, expérimenter de nouvelles sensations, comparer les textures faites de la main de l’homme et de celles de la nature environnante. 

       Je devais alors avoir l’air si angélique, si rayonnant de pureté sous mon aube de dentelle, que le père Grangeais, presque malgré lui, m’avait pris peu à peu en affection. Les apparences trompent toujours les hommes. Il est vrai que mon attitude n’était somme toute guère répréhensible. J’étais délicat et j’aimais les choses raffinées. Je n’étais pas tombé là où il le fallait, voilà tout. Pourtant, grâce à Camille et à ma curiosité galopante, je trouvai toujours de quoi satisfaire mon toucher. 

       Au début, j’appréciais tous les contrastes existant dans la nature, le brut renforçant le doux, décuplant même sa finesse. Ensuite, je me mis à fuir le contact de ce qui piquait, égratignait, heurtait les sens, aussi bien chez les plantes, les minéraux ou les éléments. Cela m’arriva imperceptiblement. 

       Une telle aversion pour le rugueux, l’excoriant n’était pourtant pas dans mon caractère. Toute sensation était alors pour moi la bienvenue. Je sais que la dualité me vint avec la haine que tous ces êtres monstrueux avaient pour moi. Très vite, j’ai associé leur laideur, leur peau horrible, squameuse, suintante, à la méchanceté gratuite, à l’absence d’intelligence, à l’insensibilité. Ils étaient le contraire de mon âme. 

       Bien entendu, à partir du moment où je n’ai plus vu en eux que des monstres, ma condition m’a pesé. Oui, ces êtres trop rustres m’étouffaient, et comme ne manquait pas de le reconnaître l’instituteur, il aurait été préférable que je fréquente un pensionnat afin d’être un peu séparé de la famille Galin et du bourg… 

    ***

       Par bonheur, cette idée lancée par le maître d’Angélus, fit son chemin dans la tête du Père Grangeais et un jour, après avoir consulté l’évêché, il se rendit chez les religieuses et demanda à voir Soeur Camille. 

       - Que diriez-vous si votre plus jeune frère poursuivait ses études chez les Frères d’Aubenac ? Je le sais fragile pour tous les travaux de nos campagnes et votre famille aura bien du mal à le placer comme apprenti ; aussi il sera une charge pour vous tous… à moins qu’il ne fasse des études afin d’accéder à un métier plus adapté à sa personne. Alors il gagnera bien sa vie et pourra aider les siens. Qu’en dites-vous ? 

       Camille mesura soudain combien elle aurait aimé offrir tout cela à son frère. Sa condition ne le lui permettait pas, aussi en conçut-elle de l’amertume. Elle répondit au curé que ce serait pour Angélus une grande bénédiction mais, qu’hélas, sa famille ne pourrait pas payer le prix de l’internat. Ne voyait-il pas, ce bon Père Grangeais, qu’ils étaient dans la misère ; que les études coûtaient cher ; que Michel, l’aîné, était revenu diminué de la guerre et qu’il ne ramenait que des payes dérisoires, quand il ne dilapidait pas le tout en beuveries à la taverne ; qu’il ne fallait plus compter sur le père, pas plus que sur Joseph marié et déjà nanti de deux enfants ? Il ne restait plus que Pierre et Germaine, mais ce n’était pas ces quelques sous qui allaient permettre de telles dépenses… 

       Alors le Père Grangeais expliqua à Camille que ses études lui seraient offertes par le diocèse et par le docteur Gagey. La jeune novice fut tellement surprise et touchée qu’elle se jeta aux pieds du prêtre, les larmes aux yeux et le coeur plein de reconnaissance. Camille, après cet élan incontrôlé, s’était bien sûr excusée de ce débordement. Le Père Grangeais, ému et troublé, chercha le ton juste. 

       - Mon enfant, relevez-vous. Je vous ai connue toute petite ; je sais combien vous êtes intelligente, dévouée et pieuse. 

       Il lui rappela qu’il la considérait depuis longtemps comme sa fille spirituelle et qu’il avait même appuyé son entrée au couvent, car il la trouvait très méritante. Ce qu’il omit de lui dire, c’est qu’en deux ans, bien malgré lui et dans le secret de son âme, torturée et palpitante, il était devenu sensible au charme troublant de sa protégée. 

       Soeur Camille accepta cette offre miraculeuse avec joie, d’autant plus que la misère chez les Galin était, comme elle l’avait avoué au prêtre, à son comble. Le père continuait à boire, suivi par le frère aîné. Thérèse, elle, avait trouvé à se marier et de leur union venait de naître une fille dont la laideur promettait de rivaliser avec celle de ses parents. 

       Angélus, depuis que sa soeur était rentrée au couvent, et bien qu’elle vienne passer tous les dimanches avec eux, avait bien du mal à supporter l’ambiance lourde et sale de la maisonnée. 

       Aussi, c’est avec soulagement qu’il apprit la nouvelle et qu’il accepta d’entrer, en octobre, comme pensionnaire chez les Frères de Saint François, ce qui ne manqua pas de rendre furieux ses anciens camarades d’infortune qui, eux, n’auraient pas le privilège d’aller paresser sur les bancs de l’école plus longtemps. 

       Le collège des Frères, depuis quelques années, passait pour un des meilleurs de la région, non seulement pour l’enseignement qui y était dispensé, mais aussi pour la droiture et le sérieux de ses Pères qui, chose rare à l’époque, avaient décidé de faire fi des différences sociales, mettant sur un pied d’égalité tous leurs élèves. Les châtiments corporels n’étaient employés qu’en cas de force majeure et envers les plus récalcitrants. 

       Cette éducation où la justice semblait avoir sa place, faisait des adeptes parmi ceux pour qui le savoir seul importait, sans distinction de classe apparente. Bien sûr, il arrivait souvent que des parents nantis aient à se plaindre que leurs enfants ne bénéficient pas de régime de faveur, comme c’était le cas dans tous les autres collèges. Ils menaçaient alors les Frères de ne plus verser d’aides à l’institution mais, fort heureusement, la congrégation était riche et pouvait se passer de leurs deniers. 

       Quant à l’évêque, il avait le Père supérieur en très grande estime et ne souhaitait pas intervenir dans cette lutte entre les bien et les mal-chaussés, trouvant, en son âme et conscience, que ces derniers valaient souvent mieux que les premiers.

    ***

    (A suivre)


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    "Ils causent tous la même langue de p... tes potes!
    - T'exagère, y'en a qui parlent, quand même..."

    "La traversée de Paris"


    Les ancêtres des peuples d'Europe 
    et d'Asie parlaient la même langue

       (...) Bien avant la naissance du mythe biblique de la Tour de Babel dans lequel Dieu condamne les peuples de la terre à ne plus se comprendre et à parler des langues différentes, il y a 15 000 ans, les ancêtres de la plupart des peuples européens et asiatiques parlaient bien la même langue.

       C'est ce que montre une étude scientifique publiée cette semaine dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences qui bouleverse nos connaissances de la linguistique et de la préhistoire. «Nous pouvons retrouver des échos d'une langue existant il y à 15 000 ans ce qui correspond à la fin du dernier âge glaciaire» explique Mark Pagel, biologiste spécialiste de l'évolution de l'Université de Reading au Royaume-Uni qui est l'un des auteurs de l'étude publiée par la revue de la National Academy of Sciences américaine. Selon cette étude, des mots phonétiquement proches de l'anglais mother (mère), father (père) et man (homme) étaient prononcés par des populations se trouvant il y a 15 000 ans dans le Caucase. (de l'anglais, évidemment...)

       Jusqu'à la publication de cette étude, d'autres chercheurs avaient réussi à trouver en Anatolie une langue qui remontait entre 8000 et 9500 ans et semblait être l'origine de la plupart des langues indo-européennes modernes.

       Pour Mark Pagel, l'évolution des langages s'apparente à celle de l'évolution biologique avec un certain nombre de constantes. Ainsi, les mots les plus utilisés évoluent bien plus lentement que les autres ce qui signifie qu'on peut trouver des racines communes et les dater. Par exemple, le français et l'anglais ont 50% de leurs mots qui dérivent d'un ancêtre commun (comme mère et mother), mais l'anglais et l'allemand ont 70% de leurs mots qui ont un ancêtre commun ce qui montre que si ces trois langues sont liées, l'anglais et l'allemand ont un ancêtre commun plus récent.

       Les chercheurs ont identifié les mots les plus importants, qui définissent les relations sociales, ceux qui changent le plus lentement dans les langages modernes et les liens entre les différentes langues actuelles. Ils ont ainsi pu remonter dans le temps et reconstituer des mots très anciens, des mots fossiles, en s'appuyant sur la fréquence de changements de certains sons entre différentes langues. Ainsi, le pater (père) en latin est clairement apparenté au father en anglais.

       L'ancêtre de pater est selon cette théorie, l'un des 23 mots issus de cette fameuse langue ancestrale d'il y a 15 000 ans. On peut y ajouter I (je), fire (feu), hand (main), to hear (entendre)… Mais il est difficile avec cette technique de remonter au-delà de 15 000 ans. «Même ces mots qui évoluent très lentement ne permettent pas de remonter plus loin» explique Mark Pagel.

       Cette étude ouvre en tout cas de nouvelles possibilités de compréhension et de connaissance de la préhistoire. En utilisant la linguistique aux côtés de l'archéologie et de l'anthropologie, on pourra par exemple mieux comprendre les mouvements de population.




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    (Ce monde tournait dans la même direction...
    Éternellement...)


    NIGHTVISION
    MONDAY: TAIYO YAMAMOTO
    (SOURCE: MOTIONADAY, VIATIMTIMTIM)

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    "Moi, j'voudrais bien travailler...
    Mais j'peux plus!
    Ben merdre alors..."


    liberation.fr

    Les belles légendes du capitalisme : 
    Pour être compétitifs, travailler plus, 
    gagner et se reposer moins

       (...) Ce qu'il y a de formidable dans le capitalisme auto régulé, c'est que lorsqu'il provoque des crises économiques monumentales, il peut compter sur un certain nombre de ses séides pour trouver des solutions qui permettront au système de gagner encore quelques années avant ... la prochaine crise.

       Néanmoins, diriez-vous il serait fort de café que des banques ou leurs représentants, dont tout le monde connaît la responsabilité dans la crise née en 2008, viennent nous expliquer ce qui est bon pour relancer la machine économique.

       Hé bien vous auriez tort, puisque c'est l'un d'eux, en l'occurrence Michel Pébereau, qui s'y colle dans le Magazine Les Enjeux Les Echos du mois de mai 2013 où il nous parle de compétitivité. 

       Mais diront certains, qui est Michel Pébereau ? Son parcours professionnel est retracé sur le site de EADS. Outre le fait qu'il est administrateur d'un bon nombre de grandes entreprises telles que : Compagnie de Saint-Gobain - Total - EADS - AXA. Il faut ajouter, entre autres : Membre du Comité exécutif de l’Institut de l’entreprise et membre du Conseil exécutif du MEDEF.

       Sinon Monsieur Pébereau est essentiellement connu pour son passage remarqué dans le monde bancaire, puisqu'il fut : Président du Conseil d'administration de BNP Paribas entre 2003 et 2011. Ce qui lui vaut aujourd'hui, entre autres, d'être : Président honoraire de BNP Paribas - Président de la fondation BNP Paribas - Membre du Conseil d’administration de BNP Paribas S.A. Suisse et membre du Conseil de surveillance de la Banque marocaine (!) pour le commerce et l’industrie.

       Il va s'en dire que Monsieur Pébereau ne peut ignorer que BNP Paribas possédait, en juillet dernier, 360 filiales dans les paradis fiscaux . Ce qui en fait sans nul doute un champion de la compétitivité et de ... l'optimisation fiscale.

       Mais ce n'est pas de cela que le Président honoraire de BNP Paribas a souhaité parler dans sa tribune. Extrait de la page 36 : « (...) Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi doit en effet réduire de 20 milliards d'€ le coût du travail. Mais dans les activités où celui-ci resterait encore trop élevé par rapport à nos voisins, ne pourrait-on pas travailler plus longtemps au même salaire, afin de préserver l'emploi et l'investissement ? Par exemple en réduisant le nombre de jours de congés ou en augmentant celui des heures travaillées (...) »

       En voilà une idée qu'elle est bonne ! Surtout lorsqu'on sait que cette logique est sans fin. En effet, au jeu de la compétitivité entre pays européens, il se trouvera toujours des endroits où on baissera les salaires, ce qui aura pour effet de faire baisser la compétitivité des autres qui du coup appliqueront le remède du docteur Pébereau.

       La seule limite dans l'immédiat étant fixée par une directive européenne qui définit un temps de travail hebdomadaire ne pouvant pas dépasser 48 heures (en moyenne, heures supplémentaires incluses). Néanmoins, sachez que, nous dit Eurogersinformation : « (...)les travailleurs peuvent, par un accord individuel avec leur employeur, renoncer à la limite des 48 heures (...) dans ce cas, la durée maximale d'heures de travail ne peut dépasser 65 heures (...) (jusqu'à la prochaine loi...)»

       Si la majorité d'entre nous trouvera particulièrement choquantes les propositions de M. Pébereau, sachez que celui-ci a pourtant de forts arguments à faire valoir : « (...) Il n'en coûterait rien aux finances publiques et celà n'affecterait pas le pouvoir d'achat des intéressés (...)»

       D'autant aurait pu ajouter M.Pébereau que la profusion de produits low cost fabriqués dans des pays où les salaires sont encore plus bas pourront satisfaire l'appétit de consommation des salariés qui travailleront plus ... pour le même prix. (...)
    Lire sur:


    £££
    Benoît Barvin

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