Ce lundi 6 février, à la tombée de la nuit, sur proposition d’un parti de la coalition gouvernementale, Le Foyer Juif, parti nationaliste religieux d’extrême droite, la Knesset (Parlement israélien) a voté une loi dite de “régularisation” (hasdara). Moyennant des indemnités fixées unilatéralement par un comité ministériel israélien, cette loi régularise l’implantation, sur des terres palestiniennes privées, d’une vingtaine de colonies “sauvages”, illégales selon le droit israélien, elles sont également appelées “avant-postes”. L’avant-poste le plus emblématique est Amona, dont la Cour suprême a pourtant ordonné le démantèlement.

   Dès la veille d’un vote que l’on pensait encore incertain, Ben Caspit, éditorialiste de Maariv (centre droit), avertissait. “Amona, coûte que coûte, sera délogée mais les colons, qu’ils soient économiques et électeurs du Likoud, ou idéologiques et électeurs du Foyer Juif, ont encore de quoi pourrir la situation et prendre en otage une société israélienne qui est majoritairement consciente que les colonies sont un obstacle à la paix, mais qui est tout aussi majoritairement convaincue que les Arabes ne veulent toujours pas de nous au Moyen-Orient et qu’un État de Palestine plein et entier est une menace existentielle. Le pouvoir judiciaire a gagné la bataille d’Amona, mais les colons vont gagner la guerre de la colonisation.”

   De fait, en faisant voter au pas de charge, et sans examen préalable en commission, la loi dite de “régularisation”, Le Foyer Juif, porte-parole idéologique des colons nationalistes au sein du gouvernement Nétanyahou, a emporté une victoire incontestable. D’autant plus incontestable que le Premier ministre, gêné aux entournures par des procédures judiciaires et effrayé par la perspective d’élections anticipées, n’a jamais paru aussi faible, alors qu’il était a priori opposé à cette loi.

   Ce que souligne l’éditorial de Ha’Aretz de ce 7 février. Une fois de plus, Nétanyahou démontre que, face à ses partenaires de droite, il peut aboyer mais n’est plus capable de mordre. Avec un tel aveu de faiblesse face à ses propres alliés, comment croire en la capacité de notre Premier ministre d’affronter nos véritables ennemis ?”

   La presse israélienne, qui relaie les protestations de l’Union européenne, est particulièrement sidérée devant le silence de l’administration Trump, en dépit de son adhésion formelle à la solution des deux États. Dans Yediot Aharonot, le rédacteur en chef Sever Plocker n’y va pas par quatre chemins : “L’attitude de Trump reflète une toute nouvelle politique américaine. Elle donne au gouvernement israélien le feu vert pour construire autant qu’il le veut dans les Territoires [occupés], tant que la construction ne va pas au-delà des blocs d’implantation [colonies]. Et si Israël s’avise de construire au-delà de ces blocs, peu lui importe.”

   L’opinion la plus tranchée vient de Maariv, sous la plume de Yossi Melman, lequel n’hésite pas à parler de “course vers l’abîme”. Par une simple loi, des bandits sont parvenus à convaincre la Knesset d’adopter une loi qui légalise rétroactivement le vol de terres à leurs propriétaires légitimes [palestiniens]. Cette loi ne fait ni plus ni moins que légaliser le crime organisé.”