• "Pour des raisons de santé, l'écrivaine Françoise Sangan décida de ne plus boire que de l'alcool concentré". Jacques Damboise in "Pensées bof".

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (PROBITÉ BIEN ORDONNÉE

    COMMENCE PAR SOI-MÊME)

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     "Chérie? T'as pas oublié quelques chose?

    - La mousse! Y'en a pas assez, c'est ça?"

    Debra Winger

    (via piratetreasure)

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    https://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article32377

    Afrique - Stephen Smith :

    « On n'a jamais connu une telle

    pression démographique »

       ENTRETIEN. À l'occasion de la sortie de son nouveau livre, « La Ruée vers l'Europe », le spécialiste de l'Afrique s'est confié sur sa vision des migrations africaines actuelles.
     
    PROPOS RECUEILLIS PAR  ET 

       / Le Point : L'Occident a-t-il une responsabilité dans l'explosion démographique de l'Afrique ?

       - Stephen Smith : Dans les années 1930, l'Occident invente le développement, la mise en valeur de ce continent, un discours intéressé qui entend valoriser les empires français ou britannique, tout en justifiant leur domination sans tomber dans la supériorité raciale. C'est le début d'un boom démographique qui aurait eu lieu de toute manière. S'il y a une responsabilité, elle est postcoloniale, l'Occident n'ayant jamais tenu un discours de vérité à l'Afrique pour lui démontrer que, si elle maîtrise sa démographie, elle contrôlera sa prospérité. Pourtant, on a employé ce discours avec l'Asie en l'aidant même à le mettre en pratique.

       / Récemment, Emmanuel Macron a pourtant parlé d'un « problème culturel à l'égard de la démographie »...

       - Une phrase qui, prise au pied de la lettre, est très juste, même si, en la matière, il faut faire preuve de pédagogie pour ne pas retomber dans le cliché de la maman africaine flanquée de ses dix enfants. Le fait est que l'Afrique, vaste continent sous-peuplé, est structurée historiquement de telle manière que la richesse humaine a toujours été perçue comme la richesse tout court. Le défi est de rompre avec cette façon de penser.

       / L'urbanisation africaine ne va-t-elle pas freiner cette démographie galopante ?

       - Les villes africaines demeurent de grands villages, sont constituées à 90 % de bidonvilles, n'ont pas d'infrastructures, avec des jeunes qui reproduisent une vie assez proche de celle du village. Contrairement à l'Histoire européenne, les grandes villes ne deviennent pas de grands centres de production qui font baisser la natalité. L'incidence ne sera donc pas semblable. De toute manière, les villes n'ont jamais empêché la migration, regardez l'exemple européen du XIXe, lorsque 60 millions d'Européens ont quitté leur continent.

       / La migration intra-africaine ne peut-elle pas absorber ces millions de candidats au départ ?

       - Cela a été le cas par le passé, comme en Côte d'Ivoire – qui, à la fin des années 1970, a accueilli 1,3 million d'étrangers en quatre ans – ou l'Afrique du Sud postapartheid – qui, au nom de l'africanisme, a fait venir des millions d'Africains, en particulier du Zimbabwe. Il faut évoquer aussi le rôle similaire de la Libye et de l'Algérie. Mais on a vu le résultat : une guerre civile en Côte d'Ivoire, une crise et des émeutes sans précédent en Afrique du Sud, une Libye à feu et à sang après l'intervention européenne, une Algérie qui commence à réprimer ses migrants. Le modèle de la migration infra-africaine est cassé.

       / Vous soutenez que le développement de l'Afrique, l'« Africa rising », alimente et alimentera la migration... Mais ce ne sont pas aussi les plus pauvres des pauvres qui partent ?

       - Non. Sur le plan statistique, si vous prenez les pays de départ et d'accueil, les études affirment le contraire. Pour partir, il faut des diplômes, un petit pactole, un esprit qui permette d'échapper à une vision étriquée, éventuellement une culture de la migration. Cela a toujours été le cas, en Europe, au Mexique... Ce sont donc les forces vives qui s'en vont. Il ne faut pas craindre de le dire sans le stigmatiser : le migrant est un défaitiste qui ne croit pas au concept de « l'Afrique qui gagne ». Si lui, qui a la tête hors de l'eau, s'en va, alors que faire ?

       / Ces migrants vont donc réduire à néant les promesses de croissance en Afrique?

       - Jusqu'en 2050, on sait que l'Europe va s'africaniser, les jeunes sont là, ils sont déjà nés, il n'y a rien à faire, on n'a jamais connu une telle pression démographique. Mais la masse démographique de l'Afrique est telle qu'elle ne manque pas de ressources, et il arrivera un moment où cet Africa rising [l'Afrique qui gagne] va retenir ses jeunes, comme cela a été le cas pour le Mexique avec ses migrants. Mais pas avant 2050. Se posera alors une autre question, celle du vieillissement de l'Afrique.

       / Vous soulignez un fossé entre les jeunes et les différentes générations au-dessus d'eux. Quels sont leurs rapports ?

       - Il faut parler en effet de différentes générations se succédant de manière accélérée. En Afrique, une génération, c'est quinze ans. Il existe tous les cas de figure. Les aînés disent à leurs cadets : « Partez, partez ! » Une manière pour eux de conserver le pouvoir tout en recevant une aide économique en retour. La migration est souvent une entreprise familiale, collective, où les « gens à l'extérieur » sont chargés de financer la famille restée au pays. Le migrant est soumis à une forte pression financière. Il peut y avoir aussi un discours de compétition : celui qui part est une tête de pont.

       / À la fin de votre ouvrage, vous envisagez cinq scénarios. Lequel a vos faveurs ?

       - D'abord, je voudrais souligner la diversité géographique dans la destination des migrations. Si 70 à 80 % des Africains choisissent l'Europe, 20 à 30 % vont sur d'autres continents. 40 % des demandeurs d'asile aux États-Unis sont d'origine africaine. En 2017, 16 500 Subsahariens ont été appréhendés en tentant de franchir la frontière entre le Mexique et les États-Unis – c'est dire le nombre de ceux qui l'ont franchie.

       Pour revenir au scénario, j'ai longtemps sous-estimé la marge de manœuvre de l'Europe, qui demeure en réalité très puissante. Les 6 milliards d'euros versés à la Turquie ont stoppé 2,5 millions de migrants, les tractations entre l'Italie et les seigneurs de la guerre libyens en ont bloqué 500 000, l'Europe n'est pas le géant flasque que l'on croit. Elle négocie aussi des conventions migratoires avec les pays de départ, ce qui édifie un autre mur de protection sur place. Mais c'est encore du coup par coup. Une politique qui ne suffira pas à contrer les vagues bien plus nombreuses qui s'annoncent.

    Cinq scénarios pour l'Europe

    1 Une Eurafrique, où un bon accueil est réservé à tous les migrants. Mais, outre le coût économique, que ne compensera pas l'apport de ces actifs pour payer les retraites des Européens, Smith prédit une crispation des Etats sur leur identité, une identity policy déjà à l'oeuvre aux Etats-Unis.

    2 Une Europe-forteresse Entre l'aide apportée à la Turquie, l'action des services secrets sur place, le soutien de l'opinion et les initiatives sécuritaires, l'Europe ne manque pas de moyens pour sécuriser ses frontières. Mais cette politique résistera-t-elle à la flambée des chiffres migratoires ? Smith en doute.

    3 Plus marginale, une dérive mafieuse déjà en cours dans l'exploitation des migrants, accompagnée d'une réaction populiste contre l'afflux de réfugiés.

    4 Un retour du postcolonialisme et de l'économie de protectorat où l'Europe, contre la promesse d'endiguer ces afflux, passerait des contrats de « gestion partagée » qui consolideraient les élites en place dans les Etats africains.

    5 Une dernière hypothèse, « de bric et de broc », combinant toutes les options précédentes, comme l'a déjà appliqué l'Espagne, le pays le plus proche de l'Afrique, qui n'a pourtant enregistré en 2015 que 13 000 demandes d'asile sur un total de 1,3 million pour toute l'Europe.

    http://afrique.lepoint.fr/actualites/afrique-stephen-smith-on-n-a-jamais-connu-une-telle-pression-demographique-02-02-2018-2191522_2365.php

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    Luc Desle

    « "On se rendit compte que l'assassin des idées blettes était très vieux lui-même". Jacques Damboise in "Pensées bof"."Avec ces économies soi-disant indispensables, on avait droit à la philosophie dans le mouroir". Jacques Damboise in "Pensées à contre-pet". »

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