Theresa May peut souffler. Pour le moment. La Première ministre conservatrice a réussi, mardi 12 et mercredi 13 juin, à faire rejeter par la Chambre des communes chacun des 15 amendements adoptés par la Chambre des Lords sur la loi de retrait de l’Union européenne. Tous, ou presque, prévoyaient la préservation de certains liens avec Bruxelles, alors que le gouvernement tente de négocier depuis un an la rupture la plus franche possible.

   Mais la locataire du 10 Downing Street ressort un peu plus éreintée de ces deux journées, alors que se profile un sommet européen crucial les 28 et 29 juin. Elle est intervenue personnellement pour convaincre la quinzaine de frondeurs conservateurs de renoncer à adopter un amendement qui prévoyait d’accorder aux députés le contrôle des négociations en l’absence d’avancées concrètes au 30 novembre prochain.

   En échange, Theresa May a promis de négocier avec eux un amendement moins radical, mais qui leur permettrait tout de même d’avoir leur mot à dire sur l’accord final. “Dieu sait quelle tournure prendront les discussions entre les conservateurs europhiles et le gouvernement, mais il y a de fortes chances que le nouveau texte ressemble davantage à ce que souhaitent ces rebelles. À chaque fois que Theresa May cède du terrain, c’est en faveur d’un Brexit doux”relève The Independent.

 

   Mais le parti conservateur n’est pas le seul à avoir exposé ses divisions sur le Brexit cette semaine. Les travaillistes aussi. “Révolte contre Corbyn”, titre le gratuit Metro. Ce mercredi 13 juin, 90 députés du Labour ont refusé de s’abstenir, comme l’avait demandé le leader du parti, afin de se prononcer sur un amendement prévoyant le maintien du Royaume-Uni dans le marché unique. “La plus importante rébellion contre la ligne du parti à la Chambre des communes depuis le débat de décembre 2015 sur les frappes en Syrie”complète The Times.

 

   Entre Edimbourg et Londres aussi, le fossé se creuse. En pleine séance, mercredi 13 juin, la totalité des 35 députés du Parti nationaliste écossais (SNP) a quitté Westminster, furieux du peu de considération accordée à leurs requêtes dans les négociations. “L’Écosse ne sera pas réduite au silence”, tonne The National, quotidien pro-indépendance. Le gouvernement local dominé par le SNP s’écharpe depuis plusieurs mois avec Theresa May sur la question des pouvoirs qui seront rapatriés de Bruxelles une fois les lois européennes transposées dans le droit britannique. À Édimbourg, on estime que Londres tente de profiter de la situation pour restreindre les prérogatives habituellement accordées aux autorités écossaises.

   Et pendant que l’on s’entre-déchire d’un côté de la Manche, de l’autre on se frotte les mains, se lamente The Times“Les fissures au sein du gouvernement sont toutes aussi évidentes que l’unanimité renforcée des 27 autres États membres sur leur stratégie de négociation et la nécessité d’inclure un élément ‘pédagogique’ dans l’accord final. Autrement dit : punir les Britanniques.”

 

   “Peut-être que tout ceci est calculé, que plus la date fatidique du 29 mars 2019 approche, moins les opposants de Theresa May oseront contrarier ses plans, tente de comprendre The Independent. Mais plus les décisions importantes sont repoussées, plus on s’approche d’une issue catastrophique. De son côté, l’hebdomadaire New Statesman n’y croit plus guère. Pour ce magazine pro-UE, le navire Brexit “a été coulé”. La faute à une paralysie générale qui empêchera le Brexit “de se concrétiser sous sa forme promise depuis deux ans”.