• "Ma glacière de boucher rafraîchit beaucoup ma Belle-Mère". Jacques Damboise in "Pensées à contre-pet".

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (LE ROI DES SAGES

    NE POSSÈDE AUCUNE COURONNE)

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    "Mon Doudou, t'y touches pas, OK?"

    http://misterdoor.tumblr.com/post/130820004252

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    "J'espère que, cette fois, ton dessin sera moins

    ridicule que la dernière fois"

    Dali et Gaïa

    delitdimages.org

    Face à Gaïa

    Auteur: Bruno Latour

    Éditeur La Découverte

     MICHEL ELTCHANINOFF

       La Terre contre-attaque. L’action humaine mène la planète et ses habitants à la catastrophe. Face à l’urgence de défendre Gaïa – le nom mythologique de la Terre –, Bruno Latour tente ici de définir ce que pourrait être une nouvelle « géo-politique ».

     

       Pourquoi nous alarmons-nous des effets du réchauffement climatique sans rien entreprendre de sérieux pour le combattre ? C’est que, au fond, nous ne voulons rien faire. Nous sommes même « devenus ceux qui auraient pu agir il y a trente ou quarante ans et qui n’ont rien fait ou si peu ». Bruno Latour appelle donc à inventer « une façon assez subtile dedésespérer », un « parcours de soin », qui nous permette de ne pas mourir idiots.

       Selon lui, notre passivité prend sa source dans la manière dont nous concevons les rapports entre l’homme et la nature. Après une Renaissance aussi féconde que violente – pensons aux guerres de religions –, les hommes du XVIIe siècle auraient décidé de proclamer d’autres sources de vérité absolue que la religion : la Science de Galilée et de Descartes, l’État de Hobbes et de Louis XIV, en attendant le Marché, nouveaux dieux d’une époque qui s’imagine affranchie des super­stitions alors qu’elle ne fait qu’en créer de nouvelles.

       Se croyant dégrisé de l’opium religieux et tourné vers la matière, le Moderne aurait en réalité inventé de nouvelles divinités. Du coup, obsédé par ces idéaux fondés sur l’exploitation des ressources, il est incapable de comprendre l’importance de la Terre et de la défendre.

       Depuis quelques années, pourtant, nous avons la preuve formelle de l’inscription de l’action humaine dans la Terre elle-même, avec l’entrée dans une nouvelle ère géologique, l’Anthropocène.

       Si nous voulons malgré tout faire quelque chose, il faut repolitiser la Terre, que Latour personnalise sous le nom de la déesse Gaïa. S’appuyant sur le« toxique et pourtant indispensable Carl Schmitt »,   philosophe et juriste engagé dans le nazisme qui cherchait à démontrer l’enracinement du droit dans la terre, Latour clame : « Au lieu d’imaginer que vous n’avez pas d’ennemi parce que vous vivez sous la protection d’une Nature (prétendument dépolitisée), désignez vos ennemis et délimitez le territoire que vous êtes prêts à défendre. » Les « Terrestres », disciples de Gaïa, doivent combattre les « Humains » enfermés dans leurs croyances aux mécanismes du marché, à l’intangibilité des États-nations et à la supériorité de la Science. Derrière ce bellicisme transparaît le souci de « nous rendre sensibles à la mortalité, à la finitude ». En admettant que nous ne sommes pas « seuls aux commandes », nous devons partager le pouvoir avec les forêts, l’eau, la terre, les animaux. Tout changer pour ne pas mourir trop vite.

       La réactivation de la « politique de la terre » de Schmitt peut étonner, tant elle a servi au nazisme. Mais Latour prend soin de se démarquer des aspects les plus « telluro-nostalgiques » de cette pensée. Le plus troublant, c’est l’insistance avec laquelle il réfute toute intention religieuse dans le choix d’un concept, qui reprend pourtant le nom d’une déesse grecque. Plus vigoureusement Latour nie toute volonté de diviniser la terre, plus la religion transparaît comme l’horizon discret de cette pensée singulière.

    Géohistoire

       Nous savons depuis quelques années que l’histoire humaine accélère l’histoire géologique. Or, pour répondre au défi de cette géohistoire, nous n’avons que des solutions économiques à proposer. C’est bien trop modeste. Les réunions internationales où l’on décide de réduire l’émission des gaz à effet de serre sont dérisoires face à l’importance des enjeux : « au moment même où il faudrait refaire de la politique, on n’a plus à notre disposition que les pathétiques ressources du “management” et de la “gouvernance” ». La solution : changer notre compréhension des choses et faire, enfin, de la « géo-politique ».

    Nouveau régime climatique

       Dans le passé, on considérait que les hommes faisaient l’histoire sur fond d’une nature inchangée. Or ce qui paraissait inamovible s’est animé. La nature interagit avec l’homme : « comme si le décor était monté sur scène pour partager l’intrigue avec les acteurs », précise Latour. Tout ce qui appartenait à la nature entre en politique. Nous devrions donc désormais adapter notre conception des choses à ce Nouveau Régime. Au risque de subir quelque chose de bien plus grave que des petites révoltes climatiques d’antan : une Révolution naturelle qui nous balaiera tous.

    Gaïa

       « Ceux qui affirment que la Terre n’a pas seulement un mouvement mais aussi un comportement qui la fait réagir à ce que nous lui faisons, ne sont pas tous des foldingues qui auraient versé dans l’étrange idée d’ajouter une âme à ce qui n’en a pas »,écrit Latour. Il prétend ainsi ressusciter « l’hypothèse Gaïa », proposée dans les années 1970 par James Lovelock. Ce scientifique britannique postulait que la Terre est un organisme vivant unissant tous les êtres en son sein. Seule cette personnification tirée de la mythologie antique est à même, selon Latour, d’expliquer l’action humaine sur notre environnement, désormais avérée, et de trouver des voies de salut. Gaïa permet d’abandonner les représentations qui ont mené à la catastrophe écologique : nous ne sommes ni Atlas portant le globe, ni« jardinier[s] de la Terre », ni « Maître[s] ingénieur[s] du vaisseau spatial Terre », ni Gardiens de la Planète bleue. Gaïa est d’abord pour Latour « une injonction pour rematérialiser l’appartenance au monde », dans une « dynamique de l’Incarnation » qui résonne d’échos chrétiens.

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    Luc Desle

    « "Cette soupe aux rêves ne me remplit pas beaucoup l'estomac". Jacques Damboise in "Pensées concomitantes"."C'était le pire ennemi que j'aie jamais vu, avec sa gentillesse dégoulinante". Jacques Damboise in "Pensées à contre-pet". »

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