• "La langue chargée de ma Belle-Mère tirait à bout portant". Jacques Damboise in "Pensées à contre-pet".

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (POUR MIEUX VIVRE

    TUTOIE TES PROPRES SOMMETS)

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    (Brandon n'aimait pas ce nouveau président)

    http://polemostasis.tumblr.com/post/100423303589/boxe

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    http://www.strategies.fr/emploi-formation/management/

    246260W/le-journaliste-touche-mais-pas-coule.html

    Grèves SNCF :

    la presse déraille

       Une phrase presque anodine, la présentatrice (journaliste ?) Florence Duprat, sur BFM TV, ose le 1er avril à 20h23 : "53% des sondés pensent que le grève n'est pas justifiée [...] Ce qui est inquiétant c'est que cela s'effrite." Voici une formule typique d'une tentative insidieuse d'orientation de l'opinion publique.

       Plus tard, elle poursuivra avec une tournure choc, digne d'un professionnel de la communication de La République en marche : "il faut dire que le statut des cheminots nous coûte 4 milliards d'euros par an". Plusieurs choses à noter avec ce sophisme. Avec le "nous", Florence Duprat utilise la sollicitation pour provoquer chez le téléspectateur un sentiment de colère et de dégoût. Le cheminot serait l'autre, cet autre qui profite du "nous", le téléspectateur. Le cheminot coûte trop cher au "nous", plusieurs milliards ! L'animatrice va même délicieusement gonfler le chiffre pour lui donner une rondeur. 4 milliards ! Néanmoins, peut-on dire que le statut du cheminot nous coûte réellement 4 milliards ? En réalité, le chiffre est plutôt de 3,2 milliards si l'on croit France 2 - voire 3,3 ou 3,5 pour les fourchettes les plus hautes selon d'autres experts (mais bon, autant arrondir à 4 plutôt que 3).

       Et puis, il y a ce non-dit qui est en réalité une désinformation (volontaire ?) de la présentatrice Florence Duprat. En réalité, les 3,2 milliards de coût du "cheminot", n'est pas totalement lié à son statut. D'une, il est dû au régime spécial de retraite. Certes, je comprends que sa question aurait été alourdie en ajoutant cette incise, le témoin, malgré tout, d'une plus grande rigueur. De deux, comme le signale le service désintox de Libéce coût est avant tout dû au faible nombre d'actifs à la SNCF, trop peu nombreux pour cotiser pour leurs retraités. Pour faire bref (plus de détails ici), même si le statut de cheminot était supprimé, le cheminot aligné sur un régime général du privé serait toujours un coût pour le contribuable. Son statut n'y est donc pour rien.

       Par ailleurs, les plus enthousiastes sur la réforme, comme le député macroniste LREM Jean-Baptiste Djebbari évitent désormais de se lancer dans la chasse au statut du cheminot pour expliquer la dette de la SNCF. Honnêteté intellectuelle oblige, le statut du cheminot n'est absolument pas responsable de celle-ci. Il est ainsi - enfin - admis que la dette est avant tout la conséquence d'une dette d'Etat et non de la SNCF. Un Etat qui a fait joujou avec certains projets pour la gloire comme les lignes LGV, dont certaines ont été clairement laissées à l'abandon (exemple : la ligne Rhin-Rhône). 

       En outre, que dire du JDD, avec sa "une" racoleuse la veille de la première grève perlée, qui pose une question à peine orientée, en affichant une photo du patron de la CGT Philippe Martinez : "Cet homme va-t-il bloquer la France ?" Pourtant, qui est responsable du blocage ? Est-ce les syndicats ou un gouvernement qui agit de manière brutale, veut une réforme libérale rapidement et avoue, à demi-mot, que les concertations avec les syndicats ne serviront qu'à justifier un semblant de dialogue ?

       Et puis, contrairement à ce qu'affirme le JDD, Philippe Martinez est-il réellement à la manœuvre ? Effectivement, plus de quatre syndicats ont appelé à faire grève, SUD-rail semble être le plus revendicatif d'entre eux. Problème pour le JDD : il n'y aucun moustachu et image d'Epinal du syndicaliste gaucho au sein de Sud. Aussi, chose embêtante, les porte-parole syndicaux de SUD-rail s'expriment plutôt bien, avec un discours posé qui fait régulièrement mouche (Bruno Poncet ou Fabien Villedieu sont deux exemples qui l'illustrent). Leur offrir une "une" aurait été plutôt contre-productif pour le JDD.

       Subtil ou pas la presse va souvent dans le même sens. La Croix titre le 2 avril : « Grève, l'exception française » et met en exergue le sempiternel modèle allemand. Ce modèle qui offre des jobs à 80 centimes de l'heure et qui a vu la petite mise en concurrence de ses transports être un échec (les prix des trains sont généralement supérieurs et une ligne Karlsruhe à Bâle a été fermée pendant plusieurs mois pour défaut d'entretien). Pourtant La Croix y voit une réussite et un "contre-exemple parlant"...

       D'autres éditorialistes, commentateurs ou animateurs tombent dans le tourbillon d'inepties gratuites que ce soit dans Les Echos, sur LCI avec David Pujadas ou Yves Calvi sur Canal+. Ils emploient, comme Florence Duprat, un lexique soigneusement choisi pour mieux influer sur les esprits. Car cette presse a choisi son camp.

       Il est celui du capitalisme libéral. Depuis plusieurs années, elle tente logiquement de défendre Alain Juppé (souvenons-nous de la Juppémania) et Emmanuel Macron.

       Vous remarquerez que les débats de fond concernant les projets de réforme sur la SNCF ou de la fonction publique sont difficiles. Logique, régulièrement la presse matraque le débat pour justifier les réformes. On écarte la profondeur pour privilégier le stimuli chez le téléspectateur. Par exemple, va-t-on détailler les exemples désastreux de l'ouverture à la concurrence des transports publics chez les voisins ? Non. Va-t-on expliquer que les Régions, subissant une nouvelle baisse de dotations de l'Etat, n'auront pas assez de moyens pour financer les lignes régionales et locales que l'Etat va leur déléguer ? Non. 

       Va-ton détailler les conséquences de la transformation de l'entreprise SNCF en société anonyme, ce qui laissera la porte ouverte à une privatisation par une augmentation de capital ? Non. En revanche, ces médias veulent provoquer l'émotion : les cheminots sont des privilégiés avec un statut, la SNCF coûte cher à chaque citoyen, les concurrents du privé offriront de bas prix, etc. 

       Ce système médiatique a bel et bien compris que la bataille de l'opinion publique sera centrale pour "casser" certains droits, en tentant d'obtenir le consentement des autres citoyens, particulièrement les salariés du privé, alors que ceux-ci seront possiblement leurs prochaines cibles. Dans la continuité des lois travail El Khomri (2016) puis des ordonnances de Muriel Pénicaud (présentées le 31 août), le pouvoir n'en n'attendait pas tant. La presse la plus visible est en phase avec ce pouvoir. Peut-on alors encore parler de journalisme ?

    "La langue chargée de ma Belle-Mère tirait à bout portant". Jacques Damboise in "Pensées à contre-pet".

    http://jcoutant.over-blog.com/article-le-travail-d-un-reporter-de-guerre-imagine-par-l-elysee-43340471.html

       Les premiers concernés par cette connivence : la presse dite "mainstream", c'est à dire les principaux canaux d'information qui, à peu de choses près, ont toute la même ligne éditoriale : pro-UE, pro-libérale, fan des Trudeau, Renzi (et logiquement des centristes français d'E. Macron à Alain Juppé) ou de Hillary Clinton, et donc automatiquement favorable à la fin d'un droit du travail à la françaised'une voix économique particulière. Evidemment, il y aura tout un vocabulaire adapté pour faire passer les régressions : le progrès, la modernité, l'évolution, la réforme, le modèle allemand ou anglo-saxon (au choix), la performance, la compétitivité, la libre-concurrence, etc. 

       Le but ? Toutes ces politiques entraînent un destin tracé et taillé sur mesure pour ceux qui les promeuvent  : la hausse des inégalités avec un enrichissement des classes les plus favorisés. Les classes moyennes, aujourd'hui éclatées en plusieurs catégories, et les classes populaires sont considérées comme des coûts et non des plus-values pour l'entreprise. Les actionnaires, les rentiers, les héritiers et les hauts salaires-spéculateurs ne considèrent pas, au XXIe siècle, l'entreprise comme une entité sociale. Elle est avant tout financière et dotée de coûts qu'il faut réduire pour dégager un maximum de marges. Pour les journalistes aux bas salaires, ceux-ci veulent flatter leur hiérarchie et vont être les plus ardents défenseurs de toutes les réformes libérales. Il y a bien des exceptions, mais trop rares.

     Revenons au débat : là où ces journalistes ou commentateurs seront moins euphoriques, ce serait sur l'éventuelle remise en cause de la niche fiscale des journalistes. Je peux d'autant mieux en parler, que moi-même je suis bénéficiaire de cette niche, mais je me garde bien, pour ma part, d'attaquer les droits des autres salariés. Bref. Peut-être une exception à la règle car convenons-en, il faut des exceptions pour confirmer une règle. Je félicite Pascal Praud pour son honnêteté sur le sujet. Lui, qui est pourtant l'une des figures de l'un des médias "mainstream", CNEWS. Lui-même l'avoue courageusement : son opinion a changé après les débats. Il considère désormais le transport public comme un monopole public naturel.

     https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/greves-sncf-la-presse-deraille-203055

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    Luc Desle

    « "Ma Belle-Mère était une femme aux dents longues de rongeurs nuisibles". Jacques Damboise in "Pensées oulàlà"."Il buvait de l'eau avec du sel ou de seltz, je ne me souviens plus bien". Jacques Damboise in "Pensées où là là". »

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