• "Il fut l'amant idéal en passant son chemin". Jacques Damboise in "Pensées contrites".

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (SAVOIR ET PARTAGE

    FONT UN BEL ATTELAGE)

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    "Bon, cette Démocratie, quand est-ce qu'on la pend?"

    Joaquin Alberto Vargas y Chávez 

    Illustration for Esquire Magazine

    http://zeezrom.tumblr.com/post/146947967765/joaquin-alberto-vargas-y-ch%C3%A1vez-illustration-for

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    https://olivierdemeulenaere.wordpress.com/2013/04/30/rappel-la-democratie-cest-important/

    Un livre tonifiant et subversif :

    La démocratie sans maîtres

       Bien qu’elle soit de moins en moins légitime, l’oligarchie politique se cramponne à ses privilèges, comptant sur l’ignorance et l’inertie des électeurs pour se maintenir au pouvoir. Malheureusement pour elle, une partie des électeurs a décidé de sortir de son ignorance, et de s’instruire auprès de dangereux penseurs tels que Matthieu Niango…

       Malgré la montée de l’abstention, la cinquième république se maintient. Elle tend même à aggraver ses tendances monarchiques, voire théocratiques. Le chef de l’État n’a-t-il pas souhaité donner un caractère « jupitérien » à la présidence de la République ? On sait aussi que nouvelles lois « sécuritaires » vont s’attaquer aux libertés publiques, transformant des mesures d’exception (l’état d’urgence) en règles habituelles.

      Face à cette dérive dictatoriale, il n’y a que deux attitudes possibles. La première consiste à détourner les yeux de ce titre spectacle et à s’abrutir avec la première drogue venue : alcool, hachich, Hanouna, séries télévisées, travail, famille, patrie…. La seconde consiste à regarder courageusement le problème en face et d’essayer de le résoudre par une réflexion à la fois personnelle et collective. Si vous préférez la première attitude, je vous suggère d’arrêter tout de suite la lecture de cet article. Dans le cas contraire, La démocratie sans maîtres est pour vous.

       Ce livre, inspiré des Mythologies de Roland Barthes, fait exploser quatre « mythes », c’est-à-dire quatre idées ou images qui faussent notre manière de voir l’ordre établi, en le présentant comme inévitable, immuable, voire naturel. En nous aidant à éliminer ces poisons mentaux, Matthieu Niango aiguise notre esprit critique, dilate notre imagination et fait remonter à notre conscience un désir de liberté que nous avions cru mort depuis longtemps. Depuis l’enfance, nous sommes habitués à considérer comme « démocratique » un régime où le pouvoir appartient en fait à une aristocratie politique censée « représenter » les citoyens. Certes, nous savons bien que cette « démocratie » est imparfaite.

       Nous sommes même prêts à reconnaître, du bout des lèvres, qu’une démocratie directe serait préférable « dans l’idéal ». Seulement, pensons-nous, cet idéal est malheureusement irréalisable. Et nous ne manquons pas d’arguments pour cela. Toute la question est de savoir ce que valent ces derniers. Ne sont-ils pas fondés sur de simples préjugés ou, comme le disait Barthes, sur des « mythes » ? Telle est bien la conviction de Matthieu Niango.

       Comme je l’ai dit plus haut, il s’attaque à quatre mythes fondateurs de notre imaginaire pseudo-démocratique : le mythe du gouvernement des plus sages, le mythe du gouvernement des plus compétents, le mythe du chaos conjuré, le mythe de la volonté libre. Nous avons beau critiquer sans arrêt les politiciens professionnels, nous ne pouvons pas nous empêcher de les idéaliser – ou, ce qui revient au même, de dévaloriser les citoyens ordinaires que nous sommes. Nous les jugeons plus sages que nous, ou plus compétents.

       Et quand bien même nous les considérons comme nos égaux, nous jugeons qu’il est indispensable de confier le pouvoir politique à une petite minorité, afin de garantir un minimum d’ordre et de cohérence dans la vie sociale. Si la démocratie était vraiment le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple, pensons-nous, quel beau bordel ce serait ! Et puis, la « démocratie » actuelle n’est pas si mal ! Nous pouvons librement choisir nos gouvernants, en fonction de leur programme politique. Ce n’est pas rien, tout de même ! Voilà, grossièrement résumé, le discours que l’on tient ordinaire sur le régime représentatif. Point par point, Matthieu Niango réfute ce discours, ou du moins prouve son caractère extrêmement douteux. Il ne s’agit pas tant, dans ce livre, de démontrer une thèse que d’ébranler des certitudes, de faire sortir le lecteur de ses confortables habitudes de soumission.

     

       Bien entendu, ce discours n’est pas entièrement neuf. Matthieu Niango s’inscrit dans une tradition déjà ancienne. On pourrait citer, entre autres, Jacques Rancière (La haine de la démocratie), Cornélius Castoriadis (dont France Culture a récemment présenté la philosophie politique dans une émission très intéressante) et bien entendu Rousseau, dont Du contrat social distingue clairement et vigoureusement la souveraineté populaire de la pseudo-liberté des électeurs, dans les régimes représentatifs. Mais Matthieu Niango ne prétend pas être entièrement original. Il cite d’ailleurs les auteurs qui ont inspiré sa pensée, notamment Rancière et Rousseau. Et puis il admet volontiers, dans cette interview que ses idées sont « dans l’air du temps ».

       Mais alors, me direz-vous, à quoi bon lire ce livre ? Eh bien ! il y a à cela plusieurs raisons très fortes. La première, c’est qu’il rassemble de nombreux arguments percutants, qu’on ne va pas forcément trouver chez les auteurs morts ou vieillissants dont je parlais plus haut. Ensuite, ces arguments sont présentés dans une langue claire et vigoureuse, accessible à un public large. Enfin, ils sont illustrés par des exemples actuels et très parlants. Certains d’entre eux sont même empruntés à l’expérience personnelle de l’auteur, qui a été conseiller à la mairie du Paris et dans des cabinets ministériels, avant de se rendre compte qu’il trahissait ses idéaux démocratiques en continuant à travailler pour des apparatchiks ou des technocrates. Des gens qui ont côtoyé de près les politiciens professionnels, on peut en trouver pas mal. Des intellectuels qui font une critique radicale de la pseudo-démocratie, c’est déjà moins courant, peut-être. Mais un intellectuel qui critique radicalement une machinerie politique qu’il connaît de l’intérieur, c’est certainement très rare.

       Est-ce à dire que La démocratie sans maîtres soit un ouvrage parfait ? Non, bien sûr. En ce qui me concerne, j’ai trouvé son dernier chapitre (Le mythe de la volonté libre) moins clair et moins bien argumenté que les autres. Il me semble aussi que Matthieu Niango a trop parlé des institutions de la république, et pas assez du déficit de démocratie dans le reste de la société, et notamment dans les entreprises. Je fais partie de ceux qui pensent qu’il y a des liens étroits entre les combats politiques et les luttes sociales. Mais ces réserves n’enlèvent rien à la force du livre. Qu’ils soient ou non discutables, les arguments de Matthieu Niango sont toujours stimulants pour la pensée. La démocratie sans maîtres est de ces ouvrages d’utilité publique qu’il faudrait massivement diffuser afin d’élever le niveau du débat politique.

    http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/un-livre-tonifiant-et-subversif-la-194524

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    Luc Desle

    « "Cet ami qui arborait un couteau entre les dents m'interloqua". Jacques Damboise in "Pensées contingentes"."Il fabriquait des cocons tiges, je crois, je ne me souviens plus très bien". Jacques Damboise in "Pensées sottes et grenues". »

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