• "Etrange: La fille du puisatier aimait bien le vin". Benoît Barvin in "Étrange, vous avez dit?"

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (LE BEAU N'EST QUE LE BEAU
    IL N'EST PAS LE VRAI)

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    COURTS RÉCITS AU LONG COURS(44)
    pcc Benoît Barvin

    http://enchantedsleeper.tumblr.com/image/31974594975

    Raconteur

       Je racontais à mes amis l'histoire de cette vieille dame qui, en sortant du supermarché d'à-côté, glissait sur une peau de banane et se fracturait le col du fémur. Je le faisais avec ma verve coutumière mais le gag, un rien facile il est vrai, ne fit pas mouche. François se tenait à la fenêtre, fumant une cigarette et regardait dehors, en direction du magasin. Il poussa un cri: "Oh Mon Dieu! Vous ne devinerez jamais! Là-bas, il y a une vieille, pareille à celle que décrivait notre ami, et elle vient de glisser... Elle semble s'être fait très mal". Excités, mes compagnons sortirent de la maison. Je les accompagnai, plus pour ne pas me faire remarquer que par réelle curiosité. Je savais déjà que cette vieille dame qui était tombée, et dont le corps s'était brisé, j'en étais responsable...

       Il y avait quelques mois, déjà, que j'avais pris conscience de ce pouvoir d'évocation trouvant son excroissance dans le réel. Je sortais de ma dernière séance de chez la thérapeute. Cette dernière utilisait également les couleurs pour "remonter les énergies". Elle m'avait dit que j'avais un "pouvoir", mais elle ne savait pas lequel. J'étais sceptique. Certes, je me sentais beaucoup mieux après l'avoir vue, mais de là à croire à ces balivernes...

       J'étais sur le pas de la porte de son immeuble, gardant dans la paume de ma main droite la pierre fine qui ne devait désormais plus me quitter. Pierre de sagesse et de pouvoir, cela ne dépendait que de moi... Je regardais, sans vraiment le voir, un cycliste qui était arrêté au feu rouge. Je ne sais pas pourquoi, mais ma pensée a dérivé. Je me suis imaginé qu'il enfourchait son engin et qu'il fonçait, se faisant ainsi renverser par une voiture qui, voyant le feu de son côté passer à l'orange, accélérait... 

       C'est exactement ce qui s'est passé, quelques secondes plus tard. Le malheureux fut renversé mais, plus de peur que de mal. Il se relevait sans bobo. Seul son vélo était "out". Intrigué par la coïncidence entre l'incident et ma création imaginaire, je constatai bientôt que je pouvais réellement influer sur le réel ou, plutôt, que je le créais. Il s'agissait hélas toujours d'incidents un rien ridicules, d'accidents du quotidien, souvent, et cela me navra. Découvrir qu'on possède le don d'influer sur la vie et ne pas pouvoir jouer vraiment au Dieu de la Création, cela avait un côté très frustrant.

       C'est un soir, en sortant du théâtre avec une amie, que ce "don" devint un vrai fardeau. Nous nous approchions de mon véhicule quand deux malfrats surgirent. Des jeunes dopés, brandissant des lames affûtées. Ils voulaient le "fric" - nous nous exécutâmes - , mais  trouvant ma copine à leur goût, ils s'en emparèrent, avec l'intention de lui faire passer un mauvais quart-d'heure. Mon cerveau en ébullition imagina qu'ils se disputaient pour savoir lequel allait la violer en premier et que cela se terminait par un étripage en règle. Ma main droite, profondément enfoncée dans la poche de mon pantalon, serrait alors fortement la pierre que je gardais toujours sur moi...

       A la Police qui vint constater, plus tard, le peu ragoutant spectacle de ces deux abrutis s'étant ouverts largement le bide, je ne dis rien d'autre que de très banal. J'étais secoué, il est vrai, par cette "représentation", issue tout droit de mon imaginaire un rien pervers. Plutôt que de les faire s'éventrer, j'aurais pu trouver une façon plus élégante de leur donner une leçon. J'étais épouvanté par ce "don" qui, plus qu'un fardeau maintenant, ressemblait à une malédiction. C'est la raison pour laquelle je refusai désormais les récits scabreux ou torturés que ma cervelle m'envoyait, en jets continus, préférant des blagues de potaches, des récits humoristiques à la O.Henry.

       Mon alacrité, ma table toujours ouverte, le choix judicieux de mets délicieux et de boissons agréables au palais m'attirèrent une cour de compagnons, tous masculins, afin de ne pas céder à l'attrait de la chair et aux catastrophes qui s'ensuivraient. Mes récits égayaient l'assemblée et, parce que j'avais hérité quelques mois plus tôt d'une tante, ma vie prit une tournure agréable. Les bassesses et les violences du Monde ne m'atteignaient plus. Mon esprit inventait nombre de récits absurdes qui, j'en étais sûr, ne produiraient aucune bavure dans le monde physique. L'incident de la vieille dame me prouvait le contraire.

       Pourtant, cela faisait un moment que je n'utilisais plus la pierre fine. Elle trônait au-milieu du meuble du salon, et je me contentais de l'observer, de loin, me demandant toujours si c'était elle ou Moi, qui possédait le don. A moins que ce ne soit la conjonction des deux.

       La malheureuse vieille était partie en ambulance. Mes amis et moi étions revenus dans la pièce. Je servis à boire et chacun commentait l'incident. Je remarquai que François m'observait, du coin de l'oeil. A un moment, il me demanda un nouveau récit mais je fus réticent. "Qu'à cela ne tienne, dit-il, d'une voix que je ne lui connaissais pas. Je vais prendre le relais de notre ami, ici présent. A mon tour de raconter des histoires... J'espère que je le ferai avec autant de talent que lui..."

       J'eus un pressentiment. Je cherchai la pierre des yeux, ne l'aperçus pas, compris qui l'avait, à présent, et je réalisai que la gemme se moquait pas mal de son porteur. 

       Connaissant l'esprit tordu de François, je rentrai la tête dans les épaules, m'attendant au pire...


    ***
    (Le seigneur du temps était également
    un sale pervers)

    ***

    "Oh Mon N'Amour...
    - Oh Ma Poulette de Luxe..."
    (As usual, l'ex-Résident 
    et sa poule de luxe
    en faisaient beaucoup trop)

    ***

    "Ahah, s'ils croient m'échapper ainsi!" cracha
    Ortogg'N'Mah, en enclenchant le propulseur
    subliminique de son vaisseau spatial..."
    (Les lectures enfantines de l'ex- Résident
    expliquaient beaucoup de choses)

    ***

    "Mon Dieu, que faire face à ces hordes de maudits mutants?
    - Leur offrir en sacrifice un des membres de notre trio...
    - Tu as raison, Teddy, il est temps pour Lorna de savoir
    que nous sommes amants!"
    ***
    "Tu es fait, Rascal! On t'a découvert, ex-Résident de mes deux!
    - Non! Moi je suis Tonto le Clown. Qui est l'ex-Résident?
    - Un bidule aussi ridicule que toi... 
    excepté le chapeau"
    ***

    STRANGE SCIENCE, published by Underwood-Miller, 1992.
    Copyright © 1992 Lail Finlay Hernandez

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    Blanche Baptiste
    (profession:humoriste)
    « "Grâce à son piano, il avait quelques touches". Jacques Damboise in "Pensées à contre-pet"."Dans cette banlieue chic, on arborait des coups de poing américains en or massif". Jacques Damboise in "Pensées à contre-pet". »

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