On est au centre de la zone grise du dopage. Des pratiques pas vraiment interdites ni franchement autorisées. Qui, si elles ne contreviennent pas aux réglement, violent l'éthique. Selon un rapport parlementaire britannique, l'équipe cycliste Sky, qui domine le peloton depuis cinq ans, y évolue comme un poisson dans l'eau. Alors que son coureur vedette Christopher Froome est actuellement l'objet d'une procédure après un contrôle positif au Tour d'Espagne, elle est accusée dans ce rapport d'avoir utilisé des corticoïdes pour améliorer les performances de ses coureurs et non pour les soigner, notamment sur le Tour de France 2012 remporté par Bradley Wiggins.

   Ce rapport de la commission d’enquête du parlement britannique estime que l’utilisation du triamcinolone, un puissant corticoïde prescrit pour les asthmatiques, visait en fait à faire perdre du poids à Wiggins et aux autres coureurs, sans pour autant les affaiblir. «Nous pensons que ce puissant corticoïde a été utilisé pour préparer Bradley Wiggins, et peut-être aussi d’autres coureurs (de l’équipe) le soutenant, pour le Tour de France, écrivent les parlementaires. L’objectif n’était pas celui d’un traitement médical, mais bien d’améliorer son rapport poids-puissance avant la course.»

   En septembre 2016, un groupe de hackers russes avait révélé - après avoir piraté le site de l’Agence mondiale antidopage (AMA) - que Bradley Wigggins avait bénéficié d’autorisations d’usage à des fins thérapeutiques (AUT) pour pouvoir prendre ce produit avant trois courses majeures. Ces dérogations constituent pour les parlementaires un paravent visant à masquer une utilisation dopante du produit.  «Cela ne constitue pas une violation du code mondial antidopage, mais franchit la ligne éthique que David Brailsford (le manager) avait dit avoir lui-même fixée pour Team Sky», poursuivent les parlementaires. 

   Le quintuple champion olympique, qui a pris sa retraite fin 2016, a réfuté «fermement l’accusation selon laquelle des médicaments ont été utilisés sans raison médicale». L’ancien entraîneur de la Sky et de l’équipe britannique de cyclisme, Shane Sutton, a indiqué aux membres de la commission que ce que Wiggins avait fait «n’était pas éthique mais pas contre le règlement».

   Dans un documentaire de la BBC en novembre 2017, Sutton avait reconnu que certains médicaments nécessitant une autorisation d'usage thérapeutique (AUT) avaient pu être utilisés pour améliorer les performances. «Si vous avez un athlète qui est à 95% de son meilleur niveau et que pour aller chercher les 5% qui lui manquent en raison d’une blessure ou d’un petit souci handicapant, il faut demander une autorisation d’usage thérapeutique (AUT), alors oui bien sûr, dans ce cas, vous le faites», avait-il déclaré.

   Dans leur rapport, les parlementaires britanniques prônent une interdiction totale des corticoïdes, alors qu’ils sont permis sans AUT par l’AMA dans certains cas en compétition.

 http://www.liberation.fr/sports/2018/03/05/dopage-sky-n-a-pas-enfreint-le-reglement-mais-viole-l-ethique_1634014