“Au premier abord, Moderna Therapeutics ressemble à la start-up la plus enviable du monde. Elle lève des fonds colossaux, s’est alliée à des géants pharmaceutiques et suit un plan radical pour révolutionner la médecine en transformant des cellules humaines en laboratoire à médicaments. Mais la réalité est plus compliquée”, prévient le site américain d’informations scientifiques STAT, qui consacre une longue enquête à cette entreprise florissante et à son PDGcontroversé : le Français Stéphane Bancel.

   Créée en 2010, Moderna Therapeutics est une entreprise innovante de biotechnologies installée à Cambridge, près de Boston, dans le Massachusetts. Projet phare de la start-up : le développement des applications thérapeutiques de l’ARNm (pour acide ribonucléique messager). Il s’agit d’une molécule porteuse d’un “code” qui peut permettre aux cellules humaines de fabriquer elles-mêmes les protéines dont elles ont besoin. A terme, la méthode développée pourrait permettre de traiter de nombreuses maladies : diabète, cancers, maladies cérébrales, cardiaques, infectieuses, etc., écrit le site.  (...)

   Tout irait pour le mieux dans le meilleur des mondes, si le PDG (depuis 2011) de Moderna Therapuetics n’était pas l’homme dévoré par l’ambition et obsédé par le secret décrit par le très sérieux magazine américain. Dès 2012, des employés de l’entreprise ont commencé à critiquer leur dirigeant publiquement. Face aux critiques et aux questions sur l’avancée des recherches, Stéphane Bancel, 44 ans, se contente d’affirmer que, lorsque le but recherché par Moderna Therapeutics sera atteint et que celui-ci sera rendu public, les médicaments mis au point vont simplement “changer le monde”.

    De son côté, le journaliste Damian Garde souligne : Nos entretiens avec 20 employés ou associés actuels ou anciens de Moderna Therapeutics suggèrent que Bancel a entravé la réussite de l’entreprise en raison de son ego démesuré, de son besoin d’exercer le contrôle et de son impatience à l’égard des revers qui sont pourtant une part inévitable de toute démarche scientifique.

   L’enquête de STAT décrit un management brutal : plus d’une dizaine de cadres virés ces douze derniers mois, des programmes abandonnés du jour au lendemain, des scientifiques maison écartés, etc. Autre source d’inquiétude selon le magazine : le discours quasi messianique de Bancel quant à la technologie développée et son manque de bagage scientifique. (...)

   (...) Ingénieur en chimie biomoléculaire formé à l’École centrale, Stéphane Bancel est titulaire d’un MBA de la Harvard Business School. Après avoir été directeur de la stratégie globale de production et de la chaîne logistique dans le groupe pharmaceutique Eli Lilly, il a dirigé bioMérieux, l’un des leaders mondiaux du diagnostic médical, avant de rejoindre Moderna.

   “Bien qu’il n’ait jamais travaillé avec les molécules ARNm, Bancel se vante d’avoir, dès le début de son arrivée à Moderna, rêvé de nouvelles expérimentations dans le domaine. Il est, de fait, listé comme un co-inventeur de plus de 100 demandes de brevet, ce qui est tout à fait inhabituel pour un PDG qui n’est pas un scientifique doctorant”, s’inquiète STAT.