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    Pensées pour nous-mêmes:

    (LEVE-TOI LE MATIN
    AVEC DES AILES)

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    Long Texte au long cours (2/2). 
    Blanche Baptiste

       La jeune Lucie commence à enquêter sur ses aïeux comme l'y pousse la discipline qu'elle a étudiée... 
    HAUTES DILUTIONS



       - Si je considère cet arbre avec attention, je vois de toute évidence que le sept septembre est pour vous une date clef, et je ne peux que vous conseiller de chercher de ce côté-là. 

       Lucie est ressortie ébranlée de la séance avec son psychothérapeute. Pourtant, il ne lui a rien appris de nouveau. Elle le savait que ce jour-là, il s’était passé quelque chose de crucial pour elle et pour sa proche famille. Elle n’a aucun mal à retrouver ses souvenirs. 

       Elle avait alors tout juste dix-huit ans et venait de réussir son bac. En octobre, elle allait rentrer à l’école de laborantine de Perpignan. Elle entretenait avec la chimie un rapport étrange fait d’attirance et de répulsion, l’attraction étant cependant la plus forte. 

       Depuis toute petite, elle avait la manie des expériences et des mélanges. Sa sœur Pépita en avait un jour fait les frais et avait bien failli mourir après absorption d’un breuvage comme en concoctent souvent les petites filles en guise de dînette. Depuis ce jour, on l’appelait la espécialista et quand son père devait préparer les dosages pour les vignes, il faisait toujours appel à elle qui maniait la règle de trois avec une aisance qui peu à peu lui faisait défaut à lui qui allait vers ses cinquante-six ans. 

       C’était un fait, le régisseur Pedro Mirales, employé depuis plus de vingt cinq ans sur le domaine des Guirandes, n’était plus vraiment à la hauteur. Certains, secrètement, convoitaient sa place et se réjouissaient de ses moindres erreurs de gestion, de ses nombreux oublis et de son incompétence face à la modernité qui arrivait au galop et le dépassait, lui qui marchait encore au pas du cheval. Le tracteur, la camionnette, c’était Marcel qui les conduisait le plus souvent et bientôt, ce serait aussi la propriété qu’il conduirait si Mirales n’y prenait pas garde. 

       Le vieux Pedro se foutait bien pas mal des manigances de son second. Il savait qu’il avait encore neuf ans à tirer et que personne ne pourrait le déloger. Il avait la confiance de son patron, le propriétaire, monsieur Delmas, ambassadeur en Espagne qui ne venait en France que pour les vacances et qui appréciait les services non seulement de Mirales mais aussi de sa femme Josefa, excellente ménagère qui entretenait à merveille le manoir jouxtant la ferme. 

       Josefa n’avait alors que cinquante ans et montrait une force et une volonté à l’ouvrage peu communes. D’origine andalouse, encore fraîche et pulpeuse, elle savait mener son monde, mine de rien, tout en ayant l’air de laisser à son mari le choix des décisions. Les mensonges étouffés, la soumission feinte, les compromissions auxquelles elle avait consenties depuis son mariage avec Mirales, avaient fait d’elle, au fil des ans, une femme de tête qui exerçait sur ce dernier un ascendant sournois. 

       Depuis quelques jours, elle se démenait pour rendre un peu plus salubres les logements dévolus aux vendangeurs espagnols qui venaient chaque année de Murcia. Mais elle avait beau faire, tout cela se dégradait et elle avait honte de ces taudis mis à disposition par monsieur Delmas. Il n’y avait ni eau, ni toilettes, ni chauffage. Pourtant, un poêle aurait été bien utile, surtout à la fin septembre quand les jours se font plus venteux et qu'il vient du Canigou des senteurs de neige et de glace. Au lieu de cela, elle voyait depuis sa fenêtre ces braves gens, ces habitués de longue date, aller se laver au bassin dans la cour et courir sous la pluie jusqu’au WC de fortune. 

       Et cette année encore, ils allaient arriver avec leur chargement de vêtements et surtout de victuailles. Des kilos de chorizo, de riz, de poisson séché, de pois chiches, et tout cela serait mis en commun par ces trois familles élargies et ils mangeraient tous autour de la grande marmite. Et sa fille Lucie voudrait comme à chaque vendange se joindre à eux. Alors, le père Mirales se mettrait en colère. Il ne supportait pas que la gamine veuille se mêler à ces espagnols. C’était depuis toujours sujet à dispute violente. 

       - Tu n’as pas à traîner avec eux ! 

       - Et quand je viens vous aider à vendanger, je suis bien avec eux aussi et vous ne dites rien. 

       - Ne discute pas ! Rien ne t’autorise à partager leurs soupers ni leurs soirées. Surtout à ton âge ! Avec ces jeunes, et moins jeunes, qui n’attendent que ça ! 

       Alors la mère intervenait avec des sous-entendus et un ton perfide. 

       - Oh toi, bien sûr, vieux dégoûtant, tu sais de quoi tu parles ! 

       Le père levait la main dans un geste avorté en injuriant Josefa. Il ne restait plus à Lucie qu’à sortir de la pièce, à les laisser ressasser leur passé, à parler de cet Angel, cet enfant que son père aurait fait à une jeune femme réfugiée comme lui en France dans un camp près d’ici. Que ce n’était que des racontards. Que cette fille avait tout inventé. Bref, des histoires sordides qui dégoûtaient Lucie et Pépita parce qu’elles sentaient qu’il y avait là-dessous une part de vérité et beaucoup de souffrances laissées dans l’ombre, quelque part, des êtres qui pouvaient en vouloir à leur famille, des ennemis capables de resurgir un jour et d’apporter la honte sur les Mirales. 

       Il avait été si difficile de se faire une place. Cela avait demandé un travail acharné, beaucoup d’orgueil rentré. Et peu à peu, ils s’étaient fondus dans la masse des gens du coin, mêlant leur accent à l’accent roussillonnais, parlant un français teinté d’hispano-catalan. Et Mirales avait su se faire apprécier, véritable bête de somme, il était devenu régisseur, sa fierté. Et son fils aîné, Pierre, employé des Postes à Paris. 

       Pépita, coiffeuse, bien installée au village. Et Lucie, la dernière, bientôt laborantine, presque docteur en somme. Oui, ils avaient bien réussi. Pour les filles, leur jeunesse n’avait été qu’une succession de brimades, de restrictions et de privations, mais le résultat était là. Il ne s’agissait pas de tout foutre en l’air au dernier moment avec des gamineries ! 

    ***
    (A Suivre)


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    (Adulte jetant son rêve d'un monde meilleur aux orties)


    Vaclav Brozik (Czech painter)

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    (Démocratie en deuil... depuis trop longtemps)


    Enigme, Alfred Agache


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    (Cet homme était si timide qu'il payait
    pour rester seul avec des cadavres féminins
    afin de leur réciter ses poèmes d'amour)


    The Autopsy ~ Enrique Simonet 1890


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    "Oh toi, ch't'aime, tu sais... Mmmm...
    Kiss, kiss...
    - Mais... Enfin! Madâme! On nous regarde!!!"


    Kiss of the Sphinx (1895), Franz von Stuck

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    Blanche Baptiste

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (A ENVIER CE QUI N'EST PAS TOI,
    TU TE PERDRAS)

    §§§

    Long Texte au long cours (2/1).
    Blanche Baptiste

       Nouveau texte qui, cette fois, s'intéresse aux secrets de famille et à la psychogénéalogie...

    HAUTES DILUTIONS



    PROLOGUE

       Elle referma le livre et se retrouva soudain amputée d’une part d’elle-même. A nouveau elle n’était plus rien, sans but, sans chemin.

       La lecture de ce roman, une fois de plus, lui avait donné l’illusion d’avoir trouvé sa légende personnelle tant elle avait fait sienne celle de cet apprenti alchimiste. Maintenant, l’enthousiasme lui manquait. Que se passait-il encore ?

       Sans cesse, elle croyait trouver sa voie et se lançait dans des tas de recherches sans jamais parvenir à être heureuse dans ce qu’elle entreprenait, si bien qu’elle lâchait ses lubies au bout de deux ou trois séances. Il n’y a qu’une seule chose à laquelle elle était fidèle : c’était la peinture. A bien y réfléchir, seule cette activité était capable de la mettre dans un état de jubilation, tout en lui procurant la frustration de n’avoir rien à exprimer d’extraordinaire. Seulement des faits, somme toute, anodins.

       Il y avait plus d’un an, elle avait participé à un stage sur le toucher. Quelle drôle d’idée d’aller passer une semaine à apprendre l’art du massage… D’autant plus qu’elle avait dû mettre sa mère et sa sœur à contribution pour pouvoir s’échapper cinq jours d’affilé.

       Professionnellement, elle n’avait pas besoin de ce genre de formation, mais il est vrai que dans sa vie privée elle s’était toujours sentie infirme de tendresse, de câlineries et autres contacts de peaux. Comme amputée à la base de ses neurones sensoriels par un manque d’état fusionnel.

       Alors ce stage avait été le bienvenu, bien sûr, et elle s’était sentie, balayés les premiers moments de fausse pudeur, tout à fait dans son élément. Comment avait-elle pu passer à côté de ces échanges tactiles ? Elle aurait pu s’abstenir de poser ce genre de questions et se contenter de vivre ces instants avec délectation, mais l’esprit est ainsi fait qu’il cherche toujours le pourquoi du comment. Et ce désarroi-là, cet excès de questionnements pousse les êtres à se poser des questions sur eux-mêmes « ad vitam aeternam ».

       Cette semaine, donc, passée à se faire malaxer, caresser, effleurer, à palper de la chair et encore de la chair, la remua profondément, plus que les autres stagiaires, c’est certain. Tant et si bien qu’elle sortit de là totalement disjonctée. On lui conseilla une psychanalyse. Elle préféra lire des livres où elle n’en finissait plus de se chercher et de se perdre.

       Enfin elle opta pour une pratique à la mode, en ces temps de grandes tempêtes dévastatrices qui vous déracinent et saccagent des arbres millénaires en une nuit.

       Il s’agissait d’une nouvelle discipline, la névro-psycho-généalogie, enseignée alors avec foi par un nouvel initié en la matière dans le sud de la France. L’idée était bel et bien dans l’air. Tout semblait perdre ses fondements, on manquait de racines au sens propre et au sens figuré. On faisait son arbre généalogique comme on partait le week-end reboiser les zones dévastées. On allait creuser dans son passé pour mieux comprendre son présent. Le symbole de l’arbre s’imposait à tous. On pensait ataviquement qu’un arbre vigoureux aux branches équilibrées, bien planté dans le sol ne pouvait porter que des fruits épanouis. On voulait être cet arbre. Et malgré les récentes tempêtes qui n’avaient épargné ni les mieux enracinés, ni les plus solides, la croyance persistait. Si bien que la plupart des gens auxquels pouvait manquer telle ou telle ramification familiale voulaient à tout prix, et parfois fort cher, retrouver leurs origines pour comprendre leurs manques, leurs errances, leurs erreurs.

       Il y eut ainsi beaucoup d’adeptes parmi les humains du tertiaire, heureux d’aller fouiller l’humus de leur existence, sans avoir à se salir les mains, si ce n’est tout au plus, sur les feuilles poussiéreuses des registres paroissiaux.

       Lucie fit donc partie du lot, ne sachant pas au juste ce qu’elle cherchait, ce qu’elle espérait trouver, ni quel chaînon manquant allait bien pouvoir la passionner, la distraire de sa vie souvent ressentie comme absurde. Elle avait à la fois besoin d’une diversion et de se recentrer, ce qui pouvait rendre l’entreprise périlleuse pour sa santé mentale.

       Le fait de se focaliser sur un objectif précis eut en tout cas l’effet de la faire se raccrocher à une chose qu’elle prenait au sérieux, une chose capable de lui donner accès à une réalité révolue qu’elle allait pouvoir appréhender avec le recul des années écoulées. Une sorte de journal du passé. Elle était sûre que les événements vécus par ses ancêtres ne la toucheraient pas comme la touchait l’actualité trop réelle de ce présent qui ne cessait de l’angoisser, tout comme il devait angoisser ses congénères. Car, vues de loin, que lui importaient au fond les misères endurées par ses aïeux. N’en ressortissaient-ils pas grandis ? Ne devenaient-ils pas des héros personnels capables de la distraire, de lui donner envie d’entreprendre.

       Elle ne les imaginait pas sous la forme d’illustres personnages, elle ne s’attendait pas à rencontrer dans sa généalogie des ancêtres royaux. Les fonctions sociales n’intéressaient pas Lucie. A quoi bon ? Ce que Lucie souhaitait trouver, c’était une réponse à son mal être et surtout comprendre enfin pourquoi le destin était si dur à son égard.

       Bref, elle cherchait un signe pour éclairer sa vie, quelque personnage qui, par-delà les ans, aurait été en relation avec elle et serait capable, en renaissant lors de ses investigations, de lui insuffler l’énergie manquante.

    ***
    (A Suivre)

    §§§

    (Sirènes punissant les méchants pêcheurs européens)


    Pourquoi la lutte contre la pêche illégale 
    est-elle un échec ?

    Propos recueillis par Magali Reinert 
    © 2013 Novethic - Tous droits réservés


       (...) Margot Stiles, directrice de campagne d'Oceana et auteur de l'étude Stolen Seafood, revient sur les raisons de l'échec de la lutte contre la pêche illégale et appelle à une meilleure traçabilité des produits de la mer.


       / Novethic : Quel nouvel éclairage apporte votre étude sur l’évolution mondiale de la pêche illégale ?

       - Margot Stiles : Le marché des produits de la pêche est de plus en plus globalisé et complexe, et entraîne de plus en plus de dégâts. Il y a toujours eu une pêche qui ciblait les espèces menacées et violait les règles de protection. Mais aujourd’hui, l’appât du gain est encore plus fort, avec des exportations qui permettent de générer des profits énormes. Les braconniers ciblent en effet les espèces chères. On estime par exemple que quatre requins sur cinq seraient pêchés illégalement, ou encore la moitié des saumons. La persistance de la pêche pirate n’est pas surprenante compte-tenu des bénéfices qu’elle rapporte, notamment des produits de la mer hauts de gamme, et ce tout en échappant aux taxes et en s’acquittant d’amendes minimes.

       / Comment s'opère la pêche illégale?

       - Notre étude insiste sur les liens entre la pêche illégale et l’approvisionnement en produits de la mer. Un cinquième des poissons pêchés illégalement est vendu aux consommateurs européens ou américains. Dans une précédente étude, nous avons montré grâce à des tests ADN qu’un tiers des poissons vendus aux États-Unis était mal étiqueté et distribué sous d’autres noms d’origine ou d’espèces.
       La pêche illégale repose sur des tours de passe-passe. Les poissons pêchés frauduleusement sont collectés dans les cargos réfrigérés et mélangés aux stocks légaux. L’aquaculture fournit aussi un moyen de blanchir les poissons volés, en particulier les élevages de thon qui rachètent aux cargos de pêche les poissons en dessous des tailles réglementaires.

       / Pourquoi la lutte contre la pêche illégale obtient-elle si peu de résultats ? 

       - Les efforts pour combattre la pêche illégale ont surtout cherché à prendre les criminels len flagrant délit. Or, c’est très difficile parce que les exactions se produisent à des kilomètres des côtes et la nuit. D’autant plus que de nombreux pays ne consacrent pas assez de ressource pour combattre les infractions. L’efficacité des organisations régionales de gestion de la pêche est également limitée, à l’image de leur volonté politique et de leur moyen. Même les navires qui sont inscrits sur les listes noires des organisations internationales ne sont interceptés qu’une fois sur quatre dans les ports.
       On sait maintenant que ce qui est nécessaire est la traçabilité des produits de la mer, pour que chaque poisson puisse être suivi du bateau à l’assiette. Contrôler l’origine du poisson compliquera l’entrée du poisson illégal dans la chaîne d’approvisionnement. L’Union européenne a légiféré pour mieux contrôler la filière (1) et nous demandons aux États-Unis de faire de même.

       / Est-ce que le Code de conduite pour une pêche responsable, mis en place par la FAO en 2001, a permis d’améliorer les choses ?

       - Malheureusement, non. Ce code de conduite est volontaire, et les études récentes ont montré que le respect de ces recommandations est extrêmement bas. Cela dit, ce texte fournit des lignes directrices pertinentes pour les pays qui cherchent à améliorer la durabilité de leur pêche.

    (1)- Le règlement européen concernant la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN), prévoit d’assurer la traçabilité du poisson.

    §§§

    (Douce Etats-Unienne offrant des fleurs aux z'Européens
    pour se faire pardonner de l'inconséquence de ses services secrets)



    §§§

    (Nouvelle technique pour faire passer, en fraude,
    le transfuge Snowden. L'espace aérien est ainsi respecté)


    EVO MORALES: 
    LA FRANCE AVAIT-ELLE LE DROIT DE REFUSER
    SON ESPACE AÉRIEN À UN CHEF D'ETAT?
    Grégoire Fleurot

       (...) Dans la nuit du mardi 2 au mercredi 3 juillet, la Bolivie a accusé plusieurs pays européens, dont la France, d’avoir refusé d’autoriser l’avion du président bolivien Evo Morales, qui revenait de Moscou, à survoler leurs territoires, obligeant l’appareil à atterrir à Vienne en Autriche.

       La Paz affirme que la France, l’Italie, le Portugal et l’Espagne ont refusé que l’avion traverse leurs espaces aériens parce qu’ils craignaient qu’Edward Snowden, l’ancien agent du renseignement à l’origine des révélations autour des programmes de surveillance et d’espionnage américains, se trouve à bord, le tout sur fond de pressions de Washington.

       Si la France a exprimé ses regrets pour les retards dans la confirmation de l'autorisation de survol de son territoire, plusieurs diplomates et responsables politiques sud-américains ont vivement critiqué l’incident et le comportement supposé des pays impliqués, estimant qu’il s’agissait d’une violation du droit international, et plus particulièrement des immunités qui protègent les chefs d’Etat.

       Un pays a-t-il le droit de refuser à un chef d’Etat de survoler son territoire? En théorie non, mais il ne peut pas lui arriver grand-chose s’il le fait. (...)

       La Convention de Vienne sur les relations diplomatiques, signée en 1961, détaille les principes de l’immunité dont jouissent les chefs de mission diplomatique, la plupart du temps les ambassadeurs, et les membres d’une mission diplomatique.

       Ce texte, ratifié par 189 pays, précise notamment qu’un Etat qui accueille un diplomate étranger doit, sauf en cas de menace pour la sécurité nationale, lui assurer la liberté de déplacement et de circulation sur son territoire. Si cette obligation ne concerne que les chefs et membres de missions diplomatiques, il est généralement accepté que l’immunité qui leur est garantie en tant que représentants de leur Etat s’applique aussi aux chefs d’Etat, qui sont de facto à la tête de la diplomatie de leur pays.

       Il existe toutefois des exceptions qui permettent à un pays de déclarer un chef d’Etat étranger persona non grata. La Suisse avait ainsi interdit dès octobre 2002 l’entrée sur son territoire au président irakien Saddam Hussein.

       Le pays doit dans ce cas informer le chef d’Etat en question de son nouveau statut d’indésirable afin d’éviter qu’il ne s’y rende. De même, un Etat qui ne reconnaît pas un autre Etat n’a pas en théorie à accorder à son chef une quelconque immunité.(...)

       (..) Evo Morales ne rentre évidemment pas dans ces deux exceptions: aucun des pays accusés de ne pas l’avoir accueilli dans son espace aérien ne l’a déclaré persona non grata et la Bolivie est reconnue par l’Union européenne.

       Malgré les annonces de Sacha Llorenti, l’ambassadeur de la Bolivie aux Nations unies, qui a affirmé qu’il allait évoquer le sujet avec le secrétaire général Ban Ki-moon, un pays qui ne respecte pas la Convention de Vienne ne s’expose cependant à aucune sanction de la part de l’ONU, et risque simplement les représailles éventuelles du pays qui s’estime lésé. L’ambassade de France en Bolivie a d’ailleurs été la cible de jets de pierre et des drapeaux français ont été brûlés à La Paz ce mercredi.

       Les violations de la Convention de Vienne, comme lors de la crise des otages américains en Iran en 1979, restent au final très rares, notamment parce que les pays ne veulent pas mettre leurs propres diplomates dans des situations délicates.

    L'explication remercie Sylvain Métille, auteur d'un mémoire sur l'immunité des chefs d'Etat au XXIe siècle.


    §§§
    Benoît Barvin

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (LAISSE PASSER LA COLÈRE SANS
    L'INVITER CHEZ TOI)


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    LONG RÉCIT AU LONG COURS (1/58)
    pcc Benoît Barvin et Blanche Baptiste 

       Dans son carnet, Angélus explique les raisons de ses recherches qu'il savait, déjà, vouées à l'échec.

    ANGÉLUS 
    ou 
    LES SECRETS DE L’IMPALPABLE



       Adèle apprit, en rentrant au couvent, que le feu avait repris soudainement, dans le séchoir. Il avait fallu s’écarter, des poutres tombaient. Le corps d’Angélus s’était embrasé comme une torche. Tout le monde avait pris peur et s’était éloigné en se signant, comme si la scène quelques instants auparavant miraculeuse, était redevenue diabolique.

       Le soir même, la jeune femme prenait la diligence et quittait définitivement Fontseranne. Elle emmenait dans son bagage ce vieux cahier parcheminé, les fioles et une once de cendre fine qu’elle était retourné prélever dans les décombres encore fumants, là où était tombé Angélus.

       Elle descendit vers la mer d’Espagne, prit le chemin de fer.

       Les paysages défilaient. De temps à autre, elle laissait s’envoler par la fenêtre de son compartiment une pincée de cendre. Les voyageurs qui faisaient route avec elle se demandaient à quel rituel se livrait cette jeune femme au sourire angélique, qui tantôt semait de la poudre aux quatre vents, tantôt en portait une pincée à ses lèvres, religieusement, eût-on dit.

       Une fois franchie la frontière, elle alla jusqu’à Barcelone et acheta un billet pour effectuer la traversée vers Mallorque. Prit-elle le bateau ; renonça-t-elle à ce voyage au dernier moment ? Nul ne le sait, car personne ne put ensuite retrouver sa trace. Ni vers Palma, ni ailleurs.

       Peut-être changea-t-elle d’identité, ou bien de pays. Sa famille, qui faisait partie des « de Lavégende » et qui avaient des appuis haut placés partout en Europe, ne put retrouver sa trace. Adèle s’était comme volatilisée.

       Pourtant, bien des pistes auraient pu les aider dans leurs investigations. Ne trouvait-on pas, en ce début de siècle, des parfumeurs qui surent mettre au point des crèmes remarquables ; des chimistes qui inventèrent des matières textiles de synthèse aussi douces et légères que la soie ? Il est curieux de voir qu’ils égalèrent en cela Angélus. On peut se demander si ce fût par l’effet du hasard, ou si quelqu’un ne leur avait pas transmis les recettes contenues dans le cahier de cet étrange magicien ? Toujours est-il qu’ils en firent commerce et que fortune s’ensuivit. Personne ne pensa que leur savoir venait de plus grand qu’eux et qu’il y avait là un mystère à éclaircir.

       De même, des êtres partirent aux quatre coins du monde pour panser les plaies semées par les guerres et aussi pour aider dans les léproseries. Là-bas, ils soignèrent et soulagèrent leurs frères. Certains y firent des prodiges. On racontait que, dans des contrées reculées de l’Inde, des hommes avaient su redonner apparence humaine aux plus touchés. Ils leur dédiaient leur vie, inventaient des recettes miraculeuses, fabriquaient des onguents qui soulageaient leur peau de bien des maux. Ils ne recherchaient pas la beauté mais parvenaient à donner du bien-être, là où il y avait malaise et souffrance.

       D’où tiraient-ils leur force tous ces êtres remarquables ? Se peut-il qu’ils aient été inspirés de près ou de loin par les découvertes d’Angélus de Fontseranne ? 

    ***

       Une chose est avérée. Angélus marqua pendant un temps, à l’insu de tous, les consciences.

       Fontseranne, après son passage, ne fut plus un bourg terne, enkysté et refermé sur lui-même et sur des principes sclérosants. Contre toute attente, certains jeunes gens dont les neveux et nièces d’Angélus, montrèrent des dispositions pour les études, pour la philosophie notamment et pour les sciences de la nature. Ils finirent par prendre goût pour tout ce qui recélait fragilité et finesse. Des échoppes s’ouvrirent où ils travaillaient avec talent le cuir, les tissus et les métaux précieux. Bien sûr, pour d’autres, cette métamorphose prit du temps, mais il est certain que le bourg connut, avant 1914 et la disparition de tous ses jeunes soldats, deux décennies florissantes.

    ***

       Elaine, pour sa part, se sentait fautive, et de la mort de la mère Supérieure et de celle d’Angélus. Il lui fallut bien des jours pour recouvrer le repos de son âme. Elle fut aidée en cela par le père Grangeais auquel elle se confessa. Le religieux, commotionné par la fin tragique de Camille, par les forces déchaînées de cette funeste Saint-Jean et par la transfiguration de l’apothicaire, avait connu après ces événements une espèce de conversion intérieure qui l’avait amené du jour au lendemain à ne plus se juger ni à juger les autres. La contrition n’était soudain plus de mise et le pardon du Seigneur devenait une évidence quotidienne. Aussi vit-il en Elaine, non pas une personne condamnable mais une future moniale pleine de bonté, de charité et débarrassée enfin de l’aiguillon de la vengeance. Celle-là même qui avait empoisonné l’existence du petit Jean, jusqu’à en faire ce tortionnaire de l’ombre que l’on sait.

       Elaine resta donc au couvent où elle apprit à épurer sa foi. Quelques années plus tard, on lui confia la tâche de diriger la communauté, ce dont elle s’acquitta avec ferveur, grâce et intelligence, pansant les plaies de l’âme des Fontserannais mieux que ne l’avaient fait autrefois les onguents maléfiques distillés par les mains vengeresses d’Angélus.



       Ce dernier resta peu dans les mémoires. Seule perdura de lui la vision que les villageois en avaient eu lors de l’incendie : celle d’un ange qui, soudain, leur serait venu du ciel pour leur faire toucher du doigt une réalité qui jusqu’alors leur avait échappée.

       Mais comme il est dit dans le langage populaire, les anges souvent ne font que passer, et le silence plein de sagesse et de compassion qui accompagne leur venue, touche uniquement les êtres dont les sens sont déjà en éveil et dont le cœur est prêt à accueillir l’impalpable.

    FIN

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    (Niqab transparent appelé encore "jihad nikah")


    (PS: traduit pauvrement en "déshabillé coquin" dans
    le sordide occident)

    TUNISIE
    La prostitution halal des tunisiennes en Syrie

       (...) François Hollande va se rendre les 4 et 5 juillet en Tunisie. Il devrait rencontrer les trois patrons provisoires de la Tunisie, le président de la république, le chef du gouvernement et le président de l'Assemblée constituante. 

       La visite de Hollande sera scrutée car le soutien apporté au président déchu Ben Ali par Nicolas Sarkozy qui, lors de sa visite officielle de 2008, avait salué « les progrès de la démocratie », n'a pas été entièrement oublié ni par les partis au pouvoir ni par ceux de l’opposition. Tout comme ils ne sont prêts pas encore d’oublier les propositions de service de Michelle Alliot-Marie, alors ministre de l’Intérieur, pour mater la révolte. 

       Actuellement, la presse tunisienne, ne cesse de traiter d’un sujet qui fait couler beaucoup d’encre, celui de l’engouement de certaines filles pour le Jihad du Nikah en Syrie. Un grand nombre de tunisiennes qui sont parties en Syrie dans le cadre du “djihad du nikah” ont exprimé leur volonté de quitter les champs de bataille et de regagner leur pays. Ces dernières ont peur d’être tuées par des djihadistes.

       Ces filles viennent pour la plupart des quartiers populaires de la périphérie des grandes villes tunisiennes où elles ont été recrutées pour aller satisfaire les pulsions sexuelles des jihadistes en Syrie. Plusieurs combattant(e)s tunisien(ne)s viennent de France, d’Allemagne et surtout de Belgique.

      Le «jihad nikah» est une forme de prostitution légalisée (ou «halalisée») par certains extrémistes religieux au nom de la nécessaire contribution à la guerre sainte.

       Il est proposé aux djihadistes tunisiennes de se soumettre au «mariage» en s’offrant aux pauvres soldats jihadistes sur le front, pour «les soulager et leur redonner des forces afin qu’ils puissent vaincre l’ennemi». Cette forme de jihad est appelé «jihad du nikah» (de mariage).JP


    @@@

    "Comment ça, ça manque de femme dans l'Empire aussi?
    Et moi, alors?
    - Vous, c'est pas pareil, Maître, vous avez une barbe"

    Star Wars : Irvin Kershner, réalisateur de L'Empire contre-attaque




    @@@

    "In God we trust... 
    et également aux chaînes d'infos pourries, évidemment"


    IN GOD WE TRUST | Art Studio Susa

    Comment les chaînes d’infos 
    terrorisent les États-Unis (Alternet)
    Murtaza HUSSAIN

       (...) Pourquoi des milliers de morts par balle chaque année peuvent être acceptés sans effort comme le « prix de la liberté », alors qu’un seul attentat appelle à la suspension des libertés civiles?

       À la suite de l’attentat du marathon de Boston, et pendant l’imposante chasse à l’homme par la police de l’auteur présumé, Dzhokhar Tsarnaev de 19 ans, le journaliste de la NBC David Gregory aurait dit aux téléspectateurs de la TV américaine : "Il s’agit d’un nouvel état de terreur auquel le pays doit s’habituer." Etant donnée la couverture hyperbolique, hors d’haleine, fournie par NBC, CNN, et beaucoup d’autres chaînes d’infos pendant la traque de Tsarnaev, il n’est nullement surprenant d’entendre Gregory faire un tel commentaire. Que ce soit dans un contexte de divertissement ou d’information (distinction qui a été rendue de plus en plus floue par les chaînes TV), la peur et l’hystérie rendent toujours convaincantes les contre-informations si on en voit.

       Cependant, il faut se poser la question devant l’affirmation de Gregory : pourquoi les Étatsuniens – dont le pays possède l’armée la plus puissante de l’histoire de l’humanité et qui dépense plus pour sa défense que l’ensemble des 13 pays suivants – devraient se résigner à vivre "dans un état de terreur" ? Les actions d’un ado révolté et de son frère aîné, assurément abominables, peuvent-elles suffire à terroriser au point de paralyser une super puissance militaire et contraindre les Étatsuniens à renoncer à leurs droits et libertés consacrés par leur Constitution ?

       Depuis le début, la couverture par les médias de l’establishment de l’attentat de Boston et de ses conséquences a été caractérisée par une combinaison d’hystérie et d’inepties. Depuis les rapports initiaux de la police qui cherchait "un homme à la peau sombre" jusqu’à la déclaration complètement erronée et encore inexpliquée du "Day One", qui affirmait qu’un suspect était effectivement détenu, le téléspectateur moyen de Fox, CBS ou MSNBC aura été de loin moins bien informé par la couverture des TV, que s’il s’était complètement abstenu d’infos TV durant la crise.

       Après plusieurs heures de reportages pour leurs millions de téléspectateurs crédules sur des "faits" qui ensuite sont devenus à peine plus que des rumeurs sans fondement, Chris Cuomo de CNN a admis : "OK. Maintenant, vous savez, nous ne savons pas ce qui est exact ou non à ce sujet." On pourrait espérer une telle honnêteté de la part d’une chaîne majeure d’information avant et non après un reportage sur une affaire aussi majeure. Malheureusement le contraire fut vrai.(...)

       (...) Bien que la propagation rapide de rumeurs, l’hyperbole et les insinuations servent très peu à informer et éclairer les millions de personnes qui comptent sur les télés pour s’informer, tout cela fonctionne très bien pour générer l’hystérie et une peur généralisée. C’est moins le résultat d’une grande conspiration que de la simple économie de marché. Tout au long de la crise, les indices d’écoute des grandes stations d’information ont bondi - explosant jusqu’à 194 % des moyennes normales pour CNN et moins, mais de manière importante, pour Fox News et MSBNC.

       Pour une industrie basée sur la publicité, où ces indices d’écoute sont les porteurs normaux de succès et de viabilité commerciale, l’attentat de Boston a fourni un coup de fouet majeur. Dans cet éclairage, on voit diminuer nettement la propension à éviter les commérages salaces et la spéculation – choses qui devraient déclencher inévitablement une grande peur parmi les téléspectateurs démunis de leurs propres moyens d’évaluation des événements  La peur et l’incertitude peuvent être mauvaises pour la population en général ainsi que pour le bon fonctionnement d’une démocratie saine. Mais elles sont indéniablement bonnes pour engendrer de plus grandes et plus lucratives audiences pour les chaines d’infos. Dans le paysage oligarchique des médias, où l’on constate à la fois des barrières élevées aux entrées et des pressions sur les acteurs en présence, les organes d’infos télé ont toutes les raisons de continuer à pousser jusqu’à l’hystérie si cela signifie une plus grande audience. Comme l’a montré leur couverture hyperbolique de la crise de Boston, ils ont peu d’hésitation à le faire quand l’occasion se produit.(...)

       Alors que le terrorisme violent est sans aucun doute réel, il est utile de rappeler quelques données statistiques de base sur le niveau de la menace qu’il représente pour le citoyen moyen. Dans leur rapport de 2010 pour Foreign Affairs, John Mueller et Mark G. Stewart ont fait une analyse comparative du terrorisme par rapport à d’autres causes potentielles de décès pour les Américains. Ce que les résultats montrent, c’est que l’Étatsunien moyen, sur base annuelle, est plus susceptible d’être tué par un de ses appareils électroménagers, par la noyade dans une baignoire, ou dans un accident de voiture impliquant un cerf, que d’être tué dans une attaque terroriste. Sans parler de la menace de la criminalité violente ordinaire, qui pose un danger plus grand que celui de la violence terroriste, criminalité ordinaire qui continue à exploser dans tout le pays.

       Néanmoins, en raison de la couverture médiatique en grande partie déséquilibrée et sensationnaliste, les Étatsuniens ont été plus disposés à se séparer de leurs droits et libertés en réponse aux menaces perçues venant du terrorisme, que des menaces des crimes ordinaires. Vu sous cet angle, il est plus facile comprendre comment de dizaines de milliers de décès par balle tous les ans peuvent être acceptés sans broncher comme le "prix de la liberté", alors qu’un seul attentat peut susciter des appels à la suspension des libertés civiles accordées aux citoyens par la Constitution américaine.(...)

       (...) Il y a les millions d’Étasuniens qui sont régulièrement victimes des médias auxquels ils accordent leur confiance pour obtenir des informations, mais qui, au lieu de cela, voient leurs plus profondes peurs manipulées dans un but financier. À côté de ceux-là, la couverture de l’attentat de Boston a produit un autre type de victime, unique, des médias.

       Le 18 avril, le lycéen de 17 ans Salah Barhoum s’est réveillé pour trouver son portrait en première page du New York Post. La une suggérait qu’il était en fait l’auteur de l’attentat du Marathon de Boston. Le chaos en tous sens et l’hystérie provoquée par la désignation des médias d’un informe « suspect à la peau brune » avait conduit les forums Internet à faire circuler le visage (à peau brune) de Barthoum comme une menace potentielle – chose que le New York Post n’a pas hésité à reprendre comme un fait pour gagner un scoop historique. L’allégation s’est révélée totalement infondée, Barhoum était simplement un spectateur innocent que la police de Boston n’a jamais considéré comme un suspect dans le crime. Néanmoins, le mal était fait.

       Tout en reconnaissant son innocence, le New York Post a refusé de s’excuser pour l’atteinte à la réputation et pour le danger potentiel qu’ils ont causé à Barhoum en l’identifiant faussement comme l’auteur d’un crime qui a provoqué la colère et la peur de tout le pays. Dans son compte rendu des jours suivant son implication erronée par une chaîne d’info importante, Barhoum s’est décrit courant terrorisé de son domicile à son école après avoir vu un homme qu’il pensait le poursuivre. De ses propres mots, il disait de son avenir : « Je vais avoir la frousse d’aller à l’école. Sur les plans professionnels et familiaux, tout va être effrayant ». A bien des égards, c’est encore un individu dont la vie a été terrifiée par un organe majeur de presse, sauf qu’aujourd’hui c’est à cause des actes de ces médias que les craintes de l’étudiant sont tout à fait fondées.(...)

       Murtaza Hussain est un écrivain et analyste basé à Toronto, axé sur les questions liées à la politique du Moyen-Orient.
      Traduit de l’anglais par JP G. pour Investig’Action

    [1]NdT : « Tabacco Moment » fait référence aux risques encourus suite aux poursuites légales que l’industrie du tabac US a subies durant les années 1990.


    @@@
    Luc Desle

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  • +++
    Pensées pour nous-mêmes:

    (LE MAÎTRE N'AGIT PAS
    IL EST L'ACTION)

    +++
    LONG RÉCIT AU LONG COURS (1/57)
    pcc Benoît Barvin et Blanche Baptiste 

       Soeur Adèle, qui éprouvait un passion trouble pour Angélus, vient de subtiliser son carnet de notes...
    ANGÉLUS 
    ou 
    LES SECRETS DE L’IMPALPABLE


       La mémoire tactile va bien plus loin que mes derniers instants. Je peux même dire que le sens du toucher perdure pour celui qui y prête attention. Cela peut sembler une aberration au commun des mortels. Mais que m’importe. Je ne veux convaincre personne, juste témoigner. Le fantastique de la chose, c’est que la sensation est alors pure, totalement débarrassée du jugement, de cet épouvantable antagonisme entre le bon et le mauvais, l’agréable et l’insupportable. 

       C’est finalement ce déclic-là que j’avais attendu toute ma vie : parvenir à me déconnecter de la prégnance du jugement. Enfant, j’avais pu atteindre cet état-là de parfaite osmose avec l’extérieur. Toutes les sensations étaient bonnes pour moi et sources d’étude, qu’elles soient âpres ou tendres. 

       Seule la haine et la stupidité de mes proches ont détourné le cours de ma vie. Sans leur regard d’envie, sans leur rejet, sans leur perfidie, je n’aurais jamais jugé la laideur ou la difformité. Pour moi, tout cela faisait partie du magma vital. 

       Et à nouveau, je ne fais plus de distinctions ; à nouveau, cette grâce m’est donnée. 

       Le feu a parcouru mon corps et j’ai pu jouir de sa caresse brûlante comme je savais jouir de celle du soleil au bord de la rivière des Joncquières. Mon corps asphyxié n’a pas souffert. Par contre, chaque cellule tout à fait consciente de ce qui lui arrivait s’est laissée envahir par la fournaise, donnant au feu sa matière et se gorgeant en échange de son énergie. Les lourds madriers de châtaignier ont mêlé leurs fibres aux miennes en un gigantesque brasier. 

       Il y a eu cette évaporation rapide des liquides intracellulaires, quelque chose de subtil, d’éthérique. Puis la carbonisation des tissus avec la densification de chaque particule et, par-dessus tout cela, la dessiccation qui pulvérise la matière en poudre soyeuse. 

       Je me volatilise dans ces milliers d’atomes, emportés vers le ciel par la chaleur des flammes, dispersés par le vent d’orage au gré des bourrasques, collés à la terre par les pluies à venir, recueillis par la main douce d’une passante exaltée. 

       J’emporte avec moi les secrets de l’impalpable.

    ***
    (A Suivre)

    +++

    "Tiens, sale franglaise!"


    Les Femens ne portent pas de tee-shirts 
    (dicton franglais)
     Théophraste R.


       Les Français, réputés allergiques aux langues étrangères, sont-ils subrepticement devenus anglophones ? Oui, prétendent les enseignes, les pubs, et jusqu’aux noms d’entreprises : épiceries Carrefour City, France Telecom (sans accents aigus), téléphonie Free, Photo-shop…

       Les pires sont les tee-shirts. Il suffit de changer la lettre « j » par « i » et le « J’aime » français devient « I love ». Pour quel bénéfice, ô pédants prétentieux, fats et ignares à la fois? Le nec plus ultra est de supprimer aussi l’article : « I love télévision ». Et non pas « la » télévision. Et notez bien la présence des accents qui, là, ne devraient pas y être, puisqu’on prétend parler anglais.

       C’est le déferlement d’un franglais pathétique. Ah ces complexés recalés au bac qui arborent des tee-shirts de l’université de Los Angeles (UCLA) ou de la poulaillerie New-yorkaise (NYPD), à commencer par l’ex-président de la France, qui parle anglais comme moi, quand je fais le pitre : hi vrite tout te blaque bohardd visse ha pisse of chalque ! (Dedaj et Gensane, anglicistes pointus corrigeront cette phrase).

       (Qui sur la photo ? J’hésite entre Marine et Marion. En tout cas, ce n’est pas Marianne).

       PS. « I love télévision » ! Je ne vous dis pas le niveau de bêtise inconsciente et satisfaite nécessaire pour se transformer fièrement en femme-sandwich qui proclame en subliminal :« I am une abrutie de première et je veux que vous le sachiez ».

       Je préfère les logos des Femens, tiens ! (...)



    +++
    (J'ouvris cette bouteille
    et toutes les nouvelles du Monde
    me sautèrent à la gorge)



    +++

    (Ce travailleur "détaché" était en retard
    à son stand de frites)


    “Le dumping social explose en Belgique”

       (...) La libre circulation des travailleurs dans l’UE a “des effets pervers” qui “gangrènent certains secteurs” de l’économie du pays, estime Le Soir.

       En 2011, on dénombrait en Belgique 337 189 travailleurs détachés, c’est -à-dire envoyés de leur pays d’origine par leur employeur pour travailler pendant une période déterminée, soit 120 000 de plus qu’en 2009. Le quotidien explique que dans l’attente d’une nouvelle directive européenne régulant le système du détachement, cette pratique “tourne au dumping social” :

       L’Etat belge est triplement lésé. Primo, les travailleurs détachés ne cotisent pas au profit de la sécurité sociale belge. Secundo, des travailleurs belges sont mis en chômage économique, le boulot étant effectué par du personnel “importé”. Tertio, les entreprises qui respectent la loi, subissent la concurrence de celles, moins scrupuleuses, qui usent et abusent du détachement [...] (...)





    +++
    Benoît Barvin

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  • ***
    Pensées pour nous-mêmes:

    (TU NE TRAVERSERAS JAMAIS
    LA MONTAGNE)
    ***

    LONG RÉCIT AU LONG COURS (1/56)
    pcc Benoît Barvin et Blanche Baptiste


       Angélus, mort, a retrouvé sa beauté angélique...

    ANGÉLUS 
    ou 
    LES SECRETS DE L’IMPALPABLE


    l'archange Saint-Michel chasseur de dragons

    CHAPITRE 22

       Adèle était restée un moment pétrifiée face à son archange. Elle était la seule à ne pas s’agenouiller devant lui car, privé de vie, Angélus, telles les statues froides des églises, ne représentait plus rien pour la jeune femme. Lorsqu’elle avait vu la foule mettre le feu à l’édifice, elle ne s’était pas inquiétée pensant qu’Angélus s’enfuirait par le fond du séchoir. Mais, pour une raison inexplicable, le jeune homme était resté et, pour finir, ils l’avaient tué. 

       Qu’il soit transfiguré ne lui apportait ni crainte ni réconfort. Plutôt un vide dont elle mesurerait, très vite, la profondeur. La seule pensée qu’elle avait, à ce moment, c’était qu’elle ne reverrait plus Angélus se baigner dans la rivière des Joncquières. Tout cela était fini. Cet ange-là était mort.

       - Si au moins, cela servait à quelque chose, pensa Adèle. Mais personne sur terre ne peut racheter les péchés du monde. Tout, ici bas, semble soumis à l’éternel recommencement. Si seulement après être tombées, les âmes pouvaient se relever et marcher droit sur la terre... Mais je ne vois que des simagrées, des mensonges, des jalousies... Non, je ne veux pas être des leurs. Tu t’es sauvé Angélus. Moi aussi, je vais me sauver. Il n’y a que cela qui importe.

       Pendant que le groupe demeurait là, prostré, elle redescendit au bourg. Elle croisa en chemin le reste du cortège qui portait, inanimée, Sœur Camille au couvent. La pluie avait cessé et le soleil inondait Fontseranne. Les ruelles étaient désertes. Alors, par la porte brisée de la boutique, la moniale entra chez l’apothicaire, le cœur battant à tout rompre. 

       Elle fureta dans les tiroirs. Ne trouvant rien, elle osa monter au premier et crut, un instant, être entrée dans quelque château féerique. Bien qu’étant issue d’une famille aisée, elle n’avait jamais eu l’occasion de côtoyer un décor aussi raffiné. Non pas dans les couleurs et dans les formes, mais dans la texture de chaque élément qui le composait. De fins voilages vous caressaient le visage lors de votre passage. Les meubles disparaissaient sous des amoncellements de coupons de velours, tous aussi doux et cependant aussi différents les uns des autres que peuvent l’être, pour des connaisseurs, les meilleurs crus de nos vignobles. 

       Il y avait peu de chances qu’elle trouvât ce qu’elle cherchait et pourtant, à force de brasser des étoffes, de remuer des objets délicats, elle finit, ivre de sensations, par mettre la main sur le cahier d’Angélus, celui-là même où, enfant, il avait noté ses premières découvertes et, plus tard, ses formules les plus extravagantes.

       Elle avisa également quelques fioles minuscules et de petits échantillons colorés qu’elle glissa dans sa poche.

       Adèle aurait été bien incapable alors de dire pourquoi elle agissait de la sorte et ce qu’elle comptait faire de ce larcin. Le fait est qu’elle sortit de la boutique, grisée, joyeuse comme une enfant dont on aurait comblé le plus cher désir.

    ***
    (A Suivre)

    ***
    "Que celui qui nous accuse d'espionnage
    se dénonce!"

    nickfury
    mdcu-comics.fr

    Comment l'Amérique espionne ses alliés
    Laura Poitras, Marcel Rosenbach,
    Fidelius Schmid, Holger Stark et Jonathan Stock

       (...) Pour la National Security Agency (NSA), c'est un fiasco. Longtemps - contrairement à la CIA, l'agence du renseignement extérieur américain -, cette institution avait réussi à opérer sans éveiller l'attention du grand public. Edward Snowden aurait "irrévocablement causé de terribles dommages" aux Etats-Unis, se plaignait il y a près de deux semaines le directeur de la NSA, le général Keith Alexander, dans un entretien accordé à la chaîne de télévision ABC.

       Les documents de la NSA révélés par Snowden concernent bien plus qu'un ou deux scandales. Ils sont comme une sorte d'instantané électronique du fonctionnement, pendant une dizaine d'années, des services secrets les plus puissants du monde. Der Spiegel a été en mesure de consulter et d'analyser plusieurs de ces documents.

       Ces dossiers montrent que l'Allemagne occupe une place de choix dans le réseau de surveillance planétaire de la NSA - et comment les Allemands eux-mêmes sont la cible des attaques de l'Amérique. Chaque mois, les services d'outre-Atlantique enregistrent près d'un demi-milliard de communications en Allemagne.(...)

       (...) Personne ou presque n'est à l'abri de cette rage de l'espionnage. Ne sont épargnés que quelques Etats triés sur le volet, que la NSA définit comme des amis proches, des partenaires de deuxième classe ("second party"),comme le dit un document interne : la Grande-Bretagne, l'Australie, le Canada et la Nouvelle-Zélande. Pour la NSA, ces pays ne seraient "pas des cibles, et il n'est pas nécessaire que ces partenaires fassent quelque chose qui serait aussi illégal pour la NSA," peut-on lire dans un texte classé "très secret".

       Cette réserve ne s'applique pas aux autres, tous les autres, y compris ce groupe d'une trentaine de pays considérés comme des partenaires de troisième classe ("third party"). "Nous pouvons intercepter les transmissions de la plupart de nos partenaires étrangers de troisième classe, et d'ailleurs, nous le faisons," se vante la NSA dans une présentation interne.

       A en croire la liste, l'Allemagne fait justement partie de ces pays placés sous surveillance. Ainsi, ces documents confirment ce que le gouvernement de Berlin soupçonne depuis longtemps : les services secrets américains, avec l'assentiment de la Maison-Blanche, ont le gouvernement fédéral à l'œil, y compris la chancelière. Il n'est pas étonnant non plus que la représentation de l'Union Européenne à Washington ait été mise sur écoute dans les règles de l'art, comme le montre un document auquel Der Spiegel a eu accès. (...)

       (...) Ce qui importe, dans ces révélations, ce n'est pas que des Etats se surveillent les uns les autres, qu'ils épient leurs ministres et pratiquent l'espionnage industriel. La véritable révélation, c'est avant tout qu'il soit possible de surveiller ses propres ressortissants et ceux de pays étrangers au-delà de tout contrôle et de toute supervision efficace. Car le principe qui veut qu'un service du renseignement extérieur n'espionne pas ses concitoyens, ou alors seulement dans le cadre d'enquêtes individuelles, semble ne plus avoir cours dans ce monde de communication et de surveillance globales.

       Le GCHQ (Government Communications Headquarters, quartier général des communications du gouvernement), un service britannique, peut surveiller tout le monde, y compris les Britanniques, de même pour la NSA, y compris les Américains, mais le Bundesnachrichtendienst (BND), peut surveiller tout le monde, sauf les Allemands. Ainsi la Matrice étend-elle son réseau de surveillance universelle, où chacun, selon le rôle qui lui est dévolu, peut aider l'autre. (...)


    ***
    (Imperturbable, l'espionne yankee fumait une taf
    en attendant que son collègue fasse le sale boulot"


    The last days of american crime T1, comics chez Emmanuel Proust ...

    ***
    "Par le Saint Nom du Capitalisme:
    Ou je ne mets pas cette pièce dans la Culture...
    Ou je la mets dans ma tirelire...
    Choix cornélien..."


    CHARLES ROBIN 
    "Le libéralisme comme volonté 
    et comme représentation"
    Pierre Le Vigan

       (...) « L’une des confusions habituelles de l’extrême gauche contemporaine (…) réside dans cette idée que le libéralisme ne désignerait rien d’autre qu’un système d’organisation économique de la société (fondé sur la propriété privée des moyens de production et la liberté intégrale des échanges marchands), qui trouverait ses adeptes les plus enthousiasmes, en France, sur la rive droite de l’échiquier politique. » Or, ce qu’explique Charles Robin, dans la veine de Jean-Claude Michéa et de Dany-Robert Dufour, c’est qu’en fait, l’extension indéfinie de l’économie de marché, va obligatoirement avec une société de marché dont l’un des éléments essentiels est l’extension continue des « droits individuels », ces mêmes droits dont l’illimitation est soutenue résolument par l’extrême gauche.

       La neutralité axiologique du libéralisme aboutit à ce que le seul critère de légitimité des actions sociales soit l’intérêt et la maximisation des satisfactions matérielles. La doctrine du droit naturel – qui seraient des droits qui tiennent à la nature même de l’homme - , qui fonde celle des droits de l’homme, postule l’auto-institution nécessaire et suffisante de la société- la fameuse « société civile » chère aux libéraux – et donc l’inanité de la recherche d’une « société bonne ». 

       Le libéralisme prend les hommes comme ils sont, et il les prend même tels qu’ils sont, le pire. Dans la vision libérale, la société bonne, ou même seulement meilleure, ne peut avoir de place, non plus que l’idée de la nécessaire amélioration morale de l’homme, ou l’idée d’excellence morale, notamment par l’éducation, et par une élévation des idéaux mis en valeur ou portés en exemple. Les humanités sont ainsi naturellement appelées à disparaître dans une société libérale – et c’est bien ce que l’on observe. Le vrai législateur tout comme le vrai éducateur deviennent, en société libérale, le Marché et l’Argent. 

       Tout comme Jean-Claude Michéa, Charles Robin insiste sur l’unité du libéralisme : il est économique et culturel. Il ne serait pas efficacement économique s’il n’était culturel. Etymologiquement, le commerce (neg-otium) c’est le contraire du loisir. Entendons le loisir au sens où il est liberté, ouverture à la contemplation, rendez-vous avec soi-même.

       On le constate en pratique tous les jours : la société libérale distrait chacun mais empêche le vrai loisir, celui qui permet de prendre du recul en soi. Le libéralisme postule que la liberté consiste en fait dans la capacité de se déraciner continuellement. Charles Robin tout comme Jean-Claude Michéa fait remonter cette vision à Kant et à Rousseau. Elle est aujourd’hui parfaitement illustrée par Vincent Peillon pour qui « l’école doit dépouiller l’enfant de toutes ses attaches [pré-républicaines]».

       Quoi de plus naturel, si l’homme est détaché de toutes attaches, en apesanteur, hors-sol, qu’il n’ait plus comme référence que le « souci de soi », vite devenu le « je ne me soucie que de moi ». L’inconvénient c’est notamment que le souci de soi d’hommes sans passé ne draine pas beaucoup de richesses humaines collectives. Il arase les diversités. En effet, seul celui qui a des traditions peut comprendre celles des autres. C’est pourquoi la diversité de l’homme en apesanteur est réduite à peu de choses. C’est une diversité-alibi d’un aplatissement généralisé. L’Européen est réduit à un Blanc, l’Africain ou l’Antillais est réduit à un Noir (et même un « black »). Le Français est réduit à un citoyen de « la patrie des droits de l’homme » (rappelons que c’est le pays qui a inventé le génocide avec la Vendée). 

       Cette réduction des authentiques différences se fait au nom de l’autonomie de l’individu mais au mépris du sens exact de ce principe qui ne signifie aucunement « faire sans les autres » ou « se passer des autres » mais choisir librement la règle que l’on se donne. C’est tout cela, et encore bien d’autres choses, que Charles Robin, de solide formation philosophique, nous donne à comprendre en un livre non seulement important mais essentiel.


    ***
    Luc Desle

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    Pensées pour nous-mêmes:

    (AVEC LE RESSENTIMENT,
    TU DÉPENSES TES FORCES INUTILEMENT)

    %%%


    LONG RÉCIT AU LONG COURS (1/55)
    pcc Benoît Barvin et Blanche Baptiste


    Angélus, poursuivi par la foule en colère, tente de fuir mais sa fin est proche...

    ANGÉLUS 
    ou 
    LES SECRETS DE L’IMPALPABLE

    Turner "Incendie"

       L’incendie se propagea comme un feu de paille à l’intérieur de la vaste salle. Le maire, le notaire et le docteur n’étaient pas là. Ils avaient renoncé à suivre la foule vengeresse. L’absence de la maréchaussée était également à noter. Seules quelques Soeurs et Elaine avaient suivi la troupe. Les autres étaient restées auprès de Camille de l’Incarnation qui venait de subir un nouveau malaise.

       Chacun regardait le spectacle des flammes qui couraient sur tout l’édifice avec une agilité dévoreuse et ce, malgré la pluie. La toiture s’effondra dans une grande gerbe d’étincelles et, un quart d’heure plus tard, il ne resta qu’un tas de cendres et de poutres calcinées. 

       Les habitants hésitèrent un peu à entrer dans les décombres fumants. Ils avancèrent cependant et découvrirent, tout au fond du séchoir brûlé, un espace qui semblait avoir été épargné. Adossé au montant de la porte, se trouvait Angélus. La fumée avait dû l’asphyxier. Son corps était intact et la pluie qui tombait toujours paraissait le laver délicatement. 

       Elaine fut une des premières à parvenir jusqu’à lui. Elle mit ses mains devant sa bouche pour étouffer le cri qui voulait s’en échapper : le visage d’Angélus avait le teint doré des icônes et ses traits mêmes semblaient avoir changé, le transfigurant en jeune adolescent. Elle tomba à genoux et se signa, emplie d’effroi devant ce spectacle prodigieux. 

       Alors la voix rauque de Thérèse, la sœur aînée d’Angélus, se fit entendre.

       - Mais on dirait Jean, mon frère défunt !

       - C’est ma foi vrai, reconnut le Père Grangeais. Par quel prodige cela est-il possible ?

       Et il s’agenouilla à son tour devant cette créature dont le souvenir retrouvé et l’absence à venir allaient faire naître en chacun de ses tortionnaires, jusqu’à la fin de leur jour, bien des remords et des mortifications.

       « In Nomine Patris et Filii, et Spiritus Sancti, Amen » psalmodia le prêtre, accompagné par les paroissiens qui se trouvaient là, écrasés par l’incompréhension et une peur incoercible.

    ***
    (A Suivre)

    %%%

    "Mais... Heu... Elles sont bizarres, tes fleurs...
    - J'aime les fleurs de pavot... Pas toi?"



    Le festin de l’araignée : 
    Africom tisse sa toile
    COMAGUER

       (...) Depuis sa création AFRICOM n’a réussi à convaincre aucun gouvernement africain de lui ouvrir son territoire pour y installer son quartier général. Ce symbole d’une nouvelle vassalisation du continent aurait été trop visible et certainement impopulaire. Le QG reste donc en Allemagne où depuis l’épisode de la Fraction Armée Rouge, et malgré la disparition du bloc soviétique aucune action de protestation politique contre la forte présence militaire étasunienne n’a eu lieu.

       Mais cette prudence diplomatique n’entrave en rien l’action permanente d’Africom sur le terrain et nombre de gouvernements africains font participer leur armée à des manœuvres avec les troupes US, font assurer la formation de leurs troupes par l’armée US (dans ce cas : Niger, Tchad Mauritanie Nigeria, Sénégal, Maroc, Algérie et Tunisie Ouganda, Burundi, Kenya, Lesotho et Botswana).

       Inutile de préciser qu’il n’est jamais question de favoriser le renforcement d’armées nationales stratégiquement autonomes qui seraient des instruments de souveraineté. Les régiments africains formés sont des troupes coloniales fournissant la chair à canon utile aux projets de l’empire et fournies en matériel et munitions made in USA.

       A cette pénétration de l’armée Us à l’intérieur même des armées africaines s’ajoute une installation permanente de troupes US dans des divers lieux. Là encore une relative discrétion est de mise et il n‘est officiellement jamais question de bases militaires étasuniennes massives comme il en existe par exemple en Italie en Allemagne et au Kosovo.

       Le journal étasunien en ligne TOMDISPATCH vient sous la plume de son directeur NICK TURSE de faire le point sur cette présence militaire US permanente dans divers pays africains.

       La plus grosse présence militaire est à Djibouti dans le camp Lemonnier jadis base de l’armée française et on peut dans ce cas parler d’une véritable base étrangère dont la création en 2002 est d’ailleurs antérieure à AFRICOM

       Avec des effectifs plus légers l’armée Us est par ailleurs installée :

       Au Kenya à Garissa, Manda Baya et Mombasa Louma point de départ de ses interventions dans la Somalie voisine où elle apporte un soutien logistique permanent aux forces de  l’Amisom de l’Union Africaine
       En République Centrafricaine à Bangui
       Au Niger à Niamey
       Au Mali à Bamako
       Au Sud Soudan pour bien montrer que la toute nouvelle l’indépendance de ce pays est un nouvel asservissement
       Au Sénégal où l’aéroport de Dakar est ouvert à l’aviation de reconnaissance de l’armée Us
       Au Burkina Faso à Ouagadougou où se trouve une base des forces spéciales d’où ont décollé 193 vols militaires au premier trimestre 2013
       En Ethiopie à l’aéroport d’Arba Minch
       En Ouganda à Entebbe Rien que pour les besoins de ravitaillement en carburant l’AFRICOM a accès à pas moins de 29 aéroports de pays africains

       Bien sûr le prétexte à cette intervention de plus en plus intense est la « guerre contre le terrorisme » sous ses divers avatars régionaux (AQMI, BOKO HARAM etç…) mais le nouveau commandant en chef d’AFRICOM le général David Rodrigues admet que l’arrivée massive d’héroïne afghane sur le continent africain via l’océan indien est un facteur d’aggravation de l’instabilité régionale. Il est vrai qu’avec la cocaïne colombienne qui arrive par l’ouest le territoire africain l’Afrique est désormais au cœur des trafics mondiaux.de drogue.

       Pour bien illustrer les influences militaires US il faut noter que la nouvelle mission de l’ONU au Mali qui se met en place à compter du mois de Juillet comportera douze mille hommes et que les deux plus gros contingents seront fournis par le Rwanda et le Nigeria deux armées sous étroite influence US.

       Quant à la piraterie dans le Golfe de Guinée qui connait une croissance très spectaculaire et va dépasser en intensité la piraterie au large de la Somalie elle ne tardera pas engendrer une riposte internationale probablement conduite par les marines de l’OTAN, Etats-Unis en tête. L’ONU a jeté les bases de cette action par la résolution 20-39. Pour commencer AFRICOM avance à pas mesurés en proposant aux Etats de la CEDEAO, comme elle l’a fait à l’occasion d’un séminaire tenu à Abidjan (qui pourrait accueillir l’Etat-major de cette future force) en Février 2013, une assistance pour la mise en place d’une police maritime commune. Cette prudence ne peut faire oublier que les maigres forces maritimes de ces états ne sauraient être opérationnelles sans la couverture électronique (GPS, radars ,…) et aérienne des Etats-Unis. (...)




    %%%

    "Chef, chef! Ils nous attaquent avec des ballons!
    - P'tain! Ils z'hésitent devant aucune turpitude, les sagouins!"



    %%%

    "Tenez! C'est autant que les pauvres n'auront pas!
    - Ahaha..."


    La Tomatina 2011 plus grande bataille de nourriture 

    Patates, carottes, et « grosses légumes ».
    Théophraste R. 
    (plagiaire d’un lecteur qui signe« Résistant »).

       (...) « L’historien Fernand Braudel distingue trois niveaux économiques dans une société humaine :

       1) l’autoconsommation : lorsque la plupart de ce que l’on produit va être consommé par soi-même, et les échanges commerciaux sont très marginaux.
       - exemple : je cultive des patates et je mange essentiellement des patates.

       2) l’économie de marché, qui consiste en un échange de productions équitable où tous les partenaires y gagnent.
       - exemple : je cultive des patates, tu cultives des carottes, j’échange une partie de ma production contre une partie de la tienne, et l’on y gagne tous les deux car nous avons une consommation plus variée. Cela peut se faire par troc direct, ou indirect avec l’usage d’une monnaie.

       3) le capitalisme, qui est une création artificielle de crises (de stocks, monétaires, diplomatiques, désinformations, guerres, famines, maladies, etc.) afin de concentrer la plus grande part des richesses entre les mains de ceux qui ont créé cette crise au détriment de tout le reste de la population.
       - exemple : comme je suis déjà plus riche (notez le préalable indispensable, pour ceux qui vous opposent l’argument hypocrite de l’égalité des chances) que les autres, je vais acheter le plus possible de patates et les stocker. Il va y avoir une pénurie artificielle de patates, les prix vont grimper, et je vendrai mes stocks au bon moment, rackettant ainsi le plus gros des richesses tandis que la population va crever de faim. Notez qu’au départ il y a toujours la même quantité de production, suffisante pour nourrir tout le monde ».
    %%%
    Benoît Barvin

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  • §§§
    Pensées pour nous-mêmes:

    (PLAINS CELUI QUI TE HAIT
    CAR IL SE FAIT DU MAL)

    §§§


    LONG RÉCIT AU LONG COURS (1/54)
    pcc Benoît Barvin et Blanche Baptiste


       Lors d'une fête religieuse, la Mère Supérieure, piquée par des abeilles, accuse Angélus d'être un empoisonneur...

    ANGÉLUS 
    ou 
    LES SECRETS DE L’IMPALPABLE



    "Fallen  Angel" Alexandre Cabanel

       Les festivités durent être écourtées Il fallut se mettre à plusieurs pour tenir la Mère Supérieure qui, à présent, tremblait de tous ses membres, et la ramener au bourg s’avéra une tâche ardue. Elle marchait pieds nus, ayant dû ôter ses sandales car ses pieds avaient doublé de volume. 

       - Conduisez-moi chez Angélus ! criait-elle.

       - Cet Angélus est de toute évidence un Démon, s’exclama Elaine, au milieu de l’assistance qui se mit à l’écouter avec intérêt. Il ose s’introduire la nuit au monastère. Je l’y ai vu de mes propres yeux. De plus, il s’exhibe effrontément devant nos Soeurs, dénudé, à la rivière des Joncquières. Je peux hélas en témoigner, étant allée cueillir des fleurs à cet endroit, pas plus tard qu’hier. Certaines personnes ici présentes pourraient attester la véracité de mes dires...

       Et elle fixa avec insistance Sœur Adèle dont les yeux s’étaient remplis de larmes. Elle ajouta, de plus en plus enfiévrée.

       - Mais le plus grave, c’est que cet homme a causé la mort de mon fiancé en lui administrant les mêmes drogues qu’il vous vend, à vous tous ! J’en ai la preuve!

       L’orage à présent roulait au-dessus d’eux. La chaleur étouffante appesantissait les esprits, faisait courir des courants électriques sur tous les protagonistes. Parfois des éclairs venaient zébrer les nuages, déchirant leur ventre pansu. Plusieurs grondements de tonnerre se firent entendre, de plus en plus proches, comme autant de roulements de tambours. La luminosité avait décru, la foule ressemblait maintenant à une masse grouillante de silhouettes surexcitées. Les hommes, échauffés par l’alcool et par ce qu’ils avaient entendu, crièrent vengeance. Le Père Grangeais, hébété, ne fit rien pour les retenir, pas plus que le maire, le notaire et le docteur Gleize, tous trois prudemment à l’écart.

       Angélus, lui, s’était retiré à l’étage de sa boutique, dans son appartement dont aucun Fontserannais n’avait franchi le seuil. Il y avait là toute une débauche de soieries qui pendaient du plafond, des tentures de mousselines, des tissus venus de tous les coins du monde, tous choisis pour leur délicatesse et leur exceptionnelle douceur. 

       Angélus qui, en les caressant, avait fini par s’assoupir sur le petit sofa de velours, entendit, mêlée aux coups de tonnerre, une clameur lointaine qui prenait, de minute en minute, plus de force. Il sut aussitôt que ces exclamations, ces cris, lui étaient adressés. Alors, sans attendre, il sortit par la petite ouverture qui donnait sur l’arrière-boutique et, alors que la porte principale volait en éclat, il s’élança en direction du monastère pour y trouver refuge.

       Une pluie fine se mit à tomber. Atteignant le haut du chemin, aux abords du cimetière, il se retourna. Tout un groupe se lançait à sa poursuite. Il ne distinguait pas les visages, à travers le rideau de la pluie qui, à présent, enflait ; juste les silhouettes, dont une qui se traînait, comme portée par la foule. Il entendit une voix qui le supplia :

       - Angélus, sauve-moi, je t’en supplie !

       Alors, l’apothicaire, noyé sous un véritable déluge liquide, attendit. Il lui était désormais impossible de fuir alors que sa sœur l’appelait au secours. Il comprit que la fin du voyage approchait. 

       Quand le groupe fut parvenu à quelques mètres de lui, et alors que l’orage se calmait quelque peu, il faillit ne pas reconnaître Camille, tant cette dernière était défigurée. Ses pieds avaient gonflé, comme atteints d’éléphantiasis. Ils étaient en sang, excoriés, suintants, et ses mains étaient si enflées qu’on les aurait pris pour celles d’un poupon dodu. 

       Sa sœur se laissa tomber sur le sol argileux en sanglotant.

       - Oh, mon amour, je t’en conjure, viens à mon secours !

       Sans s’inquiéter de ce que venait de dire Camille et de ce qu’en pouvait conclure les villageois, Angélus s’approcha et s’agenouilla auprès d’elle. Le groupe, mû à la fois par la curiosité et pris de respect et de compassion pour cette pécheresse, victime de Satan, s’écarta de l’apothicaire pour le laisser œuvrer dernière fois.

       Trempé de la tête aux pieds, sa longue chevelure blonde gorgée d’eau lui donnant l’aspect d’un martyr comme on en voyait sur les images des missels, Angélus étendit ses mains au dessus du corps de Camille et demeura ainsi, silencieux.

       Sous la pluie qui se calmait peu à peu, il était comme auréolé de bonté. Ses cheveux pâles et ruisselants redonnaient aux traits de son visage une apparence angélique. Sa chemise blanche trempée collait à son buste. On eut dit ainsi une de ces statues grecques des musées à la beauté trop parfaite. 

       Sœur Adèle ne quittait pas Angélus des yeux, comme en extase. Et elle n’était pas la seule…

       Cet instant où le temps parut suspendre son vol s’interrompit soudain quand la Mère Supérieure poussa un soupir : lentement son corps reprenait forme humaine. Les traits de son visage se rétablissaient ; ses mains se désengorgeaient ; les plaies et escarres déformant ses pieds disparurent, comme effacés par enchantement. Stupéfaite, saisie par ce soudain miracle, la foule s’écarta un peu plus encore. Un murmure s’éleva, empli à la fois d’adoration et de terreur mystique. 

       L’apothicaire déposa un baiser sur le front redevenu lisse de la Mère Supérieure. A cet instant, un éclair zigzagua dans le ciel et la foudre frappa la grande croix du cimetière. Avec une sorte de gémissement, la sculpture, brisée en deux, s’effondra. Un cri unanime d’effroi accompagna ce prodige.

       - Sauve-toi, Angélus, murmura la religieuse, en tentant de se redresser. Ils en veulent à ta vie.

       En effet les hommes, retrouvant leur esprit, dans un élan furieux, tentèrent de s’emparer de l’apothicaire. Celui-ci se releva vivement, en repoussa deux d’entre eux et s’enfuit. Après une brève hésitation, les autres se mirent à le pourchasser, suivis par les femmes en furie. Des cris de « A bas le Démon ! » se mirent à fuser d’entre leurs lèvres tordues par la haine. Mais la foule était moins agile que le fuyard et elle se fit rapidement distancer.

       Angélus courait droit devant lui, la vue brouillée par la pluie qui recommençait à tomber dru. Il avisa le vaste séchoir et s’y réfugia. Il comportait une porte dans le fond pour les courants d’air nécessaires aux différents séchages des plantes. Par là le jeune homme pourrait s’enfuir et accéder à l’écurie où le docteur Gleize avait dû laisser son cheval ce matin. 

       Il ferma la porte de devant et, adossé au bois rugueux, demeura là quelques instants dans le calme et les senteurs des coquelicots séchés. Le cœur cognant à ses tempes, Angélus était encore sous le coup d’une forte émotion. Non pas d’avoir aidé Camille à trouver un répit à ce mal, aussi soudain que mystérieux, mais que sa sœur ait pu changer intérieurement à ce point relevait du miracle ; qu’elle ose révéler à tous l’attachement qu’elle lui portait tenait peut-être plus du délire qui l’avait prise que de la volonté de dire la vérité. Lui ne savait pas influencer les âmes. Il ne faisait que guérir l’enveloppe charnelle. Quelle force mystérieuse avait bien pu intervenir ? 

       Tout en réfléchissant, Angélus laissa courir ses deux mains sur les planches de la porte à laquelle il était adossé. L’espace d’un instant, il ne réalisa pas ce qui se passait là, sous sa paume. Mais soudain, la piqûre d’une écharde lui fit comprendre que sa main gauche était, après tant d’années, à nouveau réceptive aux sensations.

      Cependant les gens du bourg martelaient déjà le vantail. Il les entendit à peine. Il restait là, ravi, observant sa main, touchant les matières alentour et s’extasiant car à chaque objet correspondait une sensation oubliée. 

       Des roulements de tonnerre ponctuèrent les coups contre la porte et les cris de la foule. Angélus savait qu’il avait encore le temps de s’en aller. Il lui suffisait de courir vers l’issue du fond, de l’ouvrir et, avec son agilité, il n’aurait aucun mal à trouver le cheval, à l’enfourcher et à partir au galop loin, très loin. Mais le miracle qui venait de s’accomplir faisait disparaître en lui toute prudence.

       En extase il caressa son visage, et put noter que sa peau avait même perdu cette rigidité qui l’accompagnait depuis si longtemps, comme un stigmate de son échec patent. Un second prodige venait donc de s’accomplir, ou plutôt, il s’agissait d’un concours de circonstances exceptionnel, sûrement, dans lequel les énergies en présence, le tonnerre, la foudre, la pluie, avaient formé un mélange unique, une combinaison parfaite, une osmose inouïe...

       La foule, redoublant d’effort, faisait résonner le lourd battant de bois. Angélus sortit enfin de son rêve éveillé. Il avança vers la porte du fond. Alors le silence s’installa de nouveau, uniquement ponctué par les rafales de pluie fine qui tapotaient sur les tuiles, qui griffaient les murs chaulés et dont la musique avait quelque chose de rassurant.

       Le jeune homme resta immobile, au milieu du lieu, frissonnant à présent dans ses vêtements mouillés. Une odeur piquante vint chatouiller ses narines. Angélus la reconnut immédiatement : ces bougres étaient en train de mettre le feu au séchoir ! 

       Il entendit quelques insultes qu’on lui jetait et, toute la chair révulsée, Angélus se précipita vers l’autre ouverture. Il eut beau secouer le battant rugueux, il ne s’ouvrit pas. On l’avait fermé par un cadenas. 

       Alors il sut qu’il était perdu.

       Il joignit les deux mains, non pas pour prier, mais pour sentir entre ses deux paumes l’infime pellicule de sensation parfaite. Elle était là cette perception perdue lors de l’accident. Plus fine et perceptible qu’elle ne l’avait jamais été. A partir de ce toucher là, il pouvait de nouveau appréhender le monde, pénétrer la moindre des textures et faire corps avec elle, fût-elle subtile et impalpable pour le commun des mortels. 

       Qu’avait-il donc cherché pendant toutes ces années, si ce n’est cette faculté qui lui avait été dérobée ? Pourquoi vouloir créer d’autres matières, quand toutes celles existantes suffisaient à combler son toucher ? Le moindre galet de rivière, le moindre pétale de fleur pouvait être un trésor entre ses doigts. De cela il était désormais persuadé. Il n’avait rien à prouver à personne. A force d’essayer de recréer la perfection du monde, cette dernière venait enfin à lui, dans le creux de ses mains jointes, au cœur des minuscules particules de l’air ambiant.
    ***
    (A Suivre)

    §§§

    (Les blagues à Bouddha plaisaient
    beaucoup à Bébé)


    caroline-francois.centerblog.net

    La question islamiste 
    en terre bouddhiste
    Rémy Valat 

       (...) Le numéro de juillet de l’hebdomadaire américain Time aborde le problème de la radicalisation du clergé bouddhiste face à l’Islam en Asie (Thaïlande du Sud et Birmanie). L’article de Beech Hannah,When Buddhists go bad, fait actuellement scandale en Birmanie. Il a notamment heurté de nombreux membres de la communauté bouddhiste qui ne se sent pas solidaire du discours du moine islamophobe Ashin Wirathu. (...)

       (...) La guerre religieuse et d’indépendance, qui débuta en 2004, continue de faire rage dans le sud de la Thaïlande. La Thaïlande se compose d’une population majoritairement bouddhiste, mais le Bouddhisme n’est pas la religion officielle du pays. Les musulmans représentent 5 % de la population, dont la majorité (4/5e) sont des locuteurs malais (les musulmans thaïlandophones représentent environ 20%), implantés dans les cinq provinces frontalières à la Malaisie (Narathiwat, Pattani, Satun, Songkla et Yala). 

       Ces régions rurales et pauvres ont subi une politique d’assimilation forcée du gouvernement de Bangkok dans les années 1960. Deux mouvements indépendantistes, le Pattani United Liberation Organization (PULO) et le Barisan Revolusi Nasional (BRN) ont pris une première fois les armes entre 1976 et 1981, puis les mouvements se cantonnèrent dans l’activisme politique et l’extorsion de fonds. 

       En réponse aux mesures musclées du chef du gouvernement deThaskin Shinawatra, la minorité religieuse mit en avant ses droits et réclama notamment le port du Hijab pour les femmes musulmanes dans les lieux publics, l’ouverture de mosquées et l’expansion des études islamiques dans les écoles publiques. C’est sur ce terreau favorable que le conflit armé latent depuis 2001 débuta en 2004. Il oppose toujours les forces gouvernementales aux mouvements indépendantistes, essentiellement, aux groupes terroristes islamistes, le Pattani Islamic Mujahadeen Movement ou Gerakan Mujahideen Islam Pattani, qui a déclaré la djihad contre les populations bouddhistes et la monarchie-junte militaire thaïlandaise.(...)

       (...) Les sources de financement des groupes insurrectionnels ne sont pas claires : l’importation de techniques et de fonds serait la main du « terrorisme international » d’Al Qaida, selon les services de renseignement nord-américains, mais rien ne l’atteste irréfutablement. Le mouvement serait plutôt un cocktail religieux, identitaire et passéiste... Selon Pak Abu, un professeur d’école coranique et chef des affaires internes du Pulo, l’objectif du mouvement serait la « libération du Patani Darussalam - la terre islamique de Patani - de l'occupation des infidèles» et de revenir au temps idéalisé (mais révolu) du sultanat de Pattani.... 


    Localisation du conflit. Les cinq provinces malaises embrasées par la guerre religieuse et 
    d’indépendance ont été rattachées au Siam par le traité de Bangkok (10 mars 1909)
    signés par la Grande-Bretagne et le royaume du Siam

       (...) Un autre responsable du mouvement islamiste aurait déclaré à un journaliste du Figaro que les réseaux sont peu structurés, très violents et capables de planifier leurs actions: l’ensemble représenterait environ 3 000 individus majoritairement des jeunes de moins de 20 ans. Selon lui, le BRN-Coordination est une « coalition informelle d'individus», cimentée par un « haine commune à l’encontre des populations siamoises. «Nous avons fait, déclare-t-il, le serment de sacrifier notre vie pour libérer notre terre ancestrale de l'occupation des infidèles.» 

       Il précise que les jeunes combattants (les juwae) ont « été repérés à la crèche, recrutés dans les écoles coraniques et mènent une guérilla urbaine de plus en plus sophistiquée». Surtout, l’indicateur du Figaro reconnaît que «le degré de brutalité» de la nouvelle génération «est parfois une source d'embarras» et déplore la « criminalisation » des troupes: «30% des combattants vendent leurs services à la mafia et aux trafiquants de drogue». 

       Leurs méthodes sont en effet radicales : attentats à l’explosif contre des cibles civiles, embuscades sur les axes routiers, assassinats, incinérations vivantes, voire décapitations de civils, d’agents symboles de l’Etat (fonctionnaires thaïlandais et religieux bouddhistes). Plus de 5 000 morts et 8 000 blessés (globalement le bilan de la guerre civile algérienne en France entre 1955 et 1962) ont été recensés entre 2004 et 2012 et le bilan ne cesse de s’alourdir, les négociations étant toujours à l’heure actuelle dans l’impasse.(...)

       (...) Les agressions contre le personnel religieux bouddhiste ont obligé l’armée royale à transformer les monastères en bases militaires et à organiser les populations bouddhistes en groupes d’autodéfense (70 000 volontaires bouddhistes) : selon Duncan McCargo, enseignant à l’université de Leeds, des rumeurs courent sur la présence dans les communautés bouddhistes d’anciens militaires ordonnés moines et sur l’armement d’une fraction des religieux : une réminiscence des moines guerriers du Japon médiéval (les sôhei) ou de Shaolin ? Non, une simple ressemblance sur la forme sans plus, les moines guerriers nippons ayant surtout pour vocation de protéger leur temple et d'y maintenir l'ordre : ils étaient aussi une force politique et armée non négligeable. 

       Nous sommes ici dans un réel contexte de guerre de religions. Il ne fait aucun doute que le discours de quelques religieux bouddhistes tend à se radicaliser : « Il n’y a pas d’autres choix, nous ne pouvons plus séparer le bouddhisme des armes désormais », aurait déclaré le lieutenant Sawai Kongsit, de l’armée royale thaïlandaise (Time). Les moines estiment que les Musulmans utilisent les mosquées pour entreposer des armes, que chaque imam est armé : « L’islam est une religion de violence » déclare Phratong Jiratamo, un moine ayant servi dans le corps des troupes de marines thaïlandaises (Time).

       (...) Cette radicalisation est nette dans le discours islamophobe du moine bouddhiste Ashin Wirathu (Mandalay, Birmanie) : discours à l’origine de lynchages, de meurtres et de comportements racistes à l’encontre des musulmans birmans (les Rohingyas) qui représentent entre 4% et 9% de la population du pays. Ashin Wirathu appelle de ses voeux un schisme entre les populations bamars (majoritairement bouddhistes) et les Rohingyas musulmans.

       Un nouvel et tragique épisode du « choc des civilisations »...(...)


    §§§

    (Les coupes budgétaires commençaient
    à en effrayer plus d'un)


    §§§

    "Alors, cette surveillance des internautes?
    - Je ne surveille pas, je veille sur eux, nuance..."
    Le techno-totalitarisme, 
    c’est maintenant

       (...) Bas les pattes devant Snowden, Manning, Assange et les résistants au techno-totalitarisme. Nul ne peut plus nier ce que les opposants à la tyrannie technologique dénoncent depuis des années : les objets intelligents qui envahissent nos vies (ordinateurs, Internet, téléphones mobiles et smartphones, GPS) donnent au pouvoir les moyens de la surveillance généralisée.

       En dévoilant des documents secrets, un ex-agent américain révèle que la NSA (Agence nationale de sécurité) espionne les internautes du monde entier, dans le cadre du programme clandestin « Prism » mis en place par George Bush et poursuivi par Barak Obama. Sont visés les utilisateurs d’Internet et des« réseaux sociaux » (Google, Facebook, Apple, Youtube, Yahoo, Skype, DropBox, Microsoft, AOL) soit, à l’ère numérique, à peu près tout le monde.

       Les esprits forts diront qu’ils le savaient déjà. Les esprits forts savent toujours tout. Edward Snowden, lui, prouve ce qu’il dit. Et les médias du monde entier ne peuvent faire autrement que de publier ses déclarations, alors que les dénonciations des esprits critiques restaient confinées et refoulées à quelques milieux restreints.

       Edward Snowden agit sans le soutien d’aucune organisation, d’aucun parti, d’aucun collectif. Heureusement – il n’aurait rien fait. Son geste relève de ce qu’Orwell nommait la « décence ordinaire ». « Je ne peux, en mon âme et conscience, laisser le gouvernement américain détruire la vie privée, la liberté d’Internet et les libertés essentielles pour les gens tout autour du monde au moyen de ce système énorme de surveillance qu’il est en train de bâtir secrètement. » (1)

       À 29 ans, il sacrifie sa carrière et sa vie personnelle, choisit la désertion, risque la prison pour trahison (comme le soldat Manning, auteur des fuites vers Wikileaks) voire un « accident ». Il affronte seul les services secrets de la première puissance mondiale.

       En France depuis le 10 juin 2013, aucune des organisations qui, avant ou depuis le meurtre de Clément Méric, clament l’urgence de la « lutte antifasciste », n’a pris la défense de Snowden. Aucune manifestation de soutien, aucun communiqué, aucun appel contre la surveillance totale, y compris celle de la DGSE française (services secrets extérieurs), comparée par un ex-agent à une « pêche au chalut ». (2) À ce jour, le seul appel pour l’asile politique de Snowden en France émane de Marine Le Pen. Un coup de pub dont le Front de Gauche n’a pas été capable.

       Edward Snowden : « Ma grande peur concernant la conséquence de ces révélations pour l’Amérique, c’est que rien ne changera. [Les gens] ne voudront pas prendre les risques indispensables pour se battre pour changer les choses... Et dans les mois à venir, les années à venir, cela ne va faire qu’empirer. [La NSA] dira que... à cause de la crise, des dangers auxquels nous devons faire face dans le monde, d’une nouvelle menace imprévisible, elle a besoin de plus de pouvoirs, et à ce moment-là personne ne pourra rien faire pour s’y opposer. Et ce sera une tyrannie clé-en-main. » (déjà en pratique...) (...)

    NOTES

    (1) Le Monde, 11/06/2013

    (2) Le Monde, 12/06/2013


    Lire la suite sur:
    §§§
    Luc Desle

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